QUATRIÈME DIMANCHE APRÈS PAQUES

1. Premières impressions. — Aujourd’hui précisément l’Église nous parle de l’action du Saint-Esprit. Cette action est triple : dans le monde, dans l’Église et dans l’âme. Dans le monde : Le Saint-Esprit présentera au monde coupable un miroir dans lequel il pourra voir sa culpabilité, la vérité et la juste cause de l’Église, mais aussi le châtiment qui le menace. Le Saint-Esprit montre au monde la marche victorieuse de l’Église qu’il dirige. Le monde impie doit reconnaître ces faits en grinçant des dents, même s’il ne veut pas en convenir extérieurement. Avant le Christ, le monde croupissait dans la souillure de ses vices, mais il ne se rendait pas compte de son état dégénéré. Aujourd’hui, l’Église est comme le reproche de la conscience pour les mauvais. Aussi, le monde hait l’Église parce qu’elle ne cesse de secouer son repos paresseux et de mettre le doigt sur ses plaies. Combien, cependant, n’ont pu supporter ce reproche et se sont convertis au Christ ! Telle est, en effet, l’action du Saint-Esprit sur le monde : Ou bien les hommes se convertissent au Christ, ou bien ils haïssent le Christ ; ils reconnaissent leurs péchés, la justice de l’Église et l’approche menaçante du jugement, soit pour leur salut, soit pour leur perte. Mais, de toute façon, ils reconnaîtront ces vérités et c’est là l’œuvre du Saint-Esprit dans le monde.
               
Plus douce est l’action du Saint-Esprit dans l’Église. Il y continue l’œuvre du Christ sur la terre ; il enseigne l’Eglise, il rappelle au magistère tout ce que le Christ dit : il garde l’Église exempte de fautes et d’erreurs. Chrétiens, que de choses nous pourrions dire sur l’action du Saint-Esprit dans l’Église ! Tous les sacrements sont son œuvre. Dans le Baptême, il nous fait ses temples. Dans la Confirmation ; il fait de nous des combattants, des prêtres (au sens large), des martyrs. L’Eucharistie est son œuvre. De même que, jadis, il a été l’auteur de l’humanité du Christ, de même, à la messe, il change le pain et le vin au corps et au sang du Christ. Le pouvoir de remettre les péchés est son œuvre. C’est pourquoi le Sauveur dit : “ Recevez le Saint-Esprit ; les péchés seront remis à ceux à qui vous les remettrez... ” Nous voyons donc quelle grande action exerce le Saint-Esprit dans l’Église.
En parlant de son action dans l’Église, nous avons déjà parlé de son action dans l’âme. Il est notre guide dans cette vallée de larmes. Il est le docteur de l’âme individuelle. Il y a, dans notre cœur, un jardin dans lequel il cultive la semence divine et l’arrose. Sans lui, rien ne pousserait. C’est lui, aussi, qui écarte la mauvaise herbe de ce jardin. Nous comprenons ce que cela veut dire. Les fleurs sont les vertus, les fruits sont les bonnes œuvres et les mauvaises herbes sont les péchés.
              
2. La messe (Cantate). - La messe nous manifeste l’action véritable du Saint-Esprit. Dans l’Introït, l’Alleluia est le point central. “ Chantez au Seigneur le cantique nouveau : Alleluia ”. On nous dit aussi le motif de notre chant : “ Il a fait des merveilles ”. Ces merveilles que Dieu manifeste aux regards du monde, ce sont les œuvres du Saint-Esprit. C’est le Saint-Esprit qui fond les fidèles dans une unité, le corps mystique du Christ ; c’est lui qui, sur la mer orageuse de la vie, ancre nos cœurs au ciel, où le Christ nous a précédés (Or.). Le Saint-Esprit “ descend de là-haut ” il est le “ don parfait du Père des lumières ”, il fait de nous des hommes de lumière “ au milieu des ombres obscures ” de la vie terrestre. Nous avons été “ régénérés ” à Pâques par la divine “ Parole ”, le Christ. C’est alors que la plante divine a été placée dans le jardin de notre cœur. Nous devons ;maintenant, laisser agir le divin jardinier, le Saint-Esprit, afin que “ notre âme soit bienheureuse” (Ep.). Ce divin jardinier est “ la droite du Seigneur” (Le Saint-Esprit est souvent appelé, dans la Sainte-Écriture et la liturgie, le doigt de Dieu). La droite de Dieu crée la victoire, l’exaltation, la vie (Allel.). C’est pourquoi il est bon pour nous que le Christ s’en aille. Ce n’est qu’à cette condition que viendra le Paraclet victorieux, le guide, le docteur qui nous fera pénétrer toujours plus avant dans la doctrine du Christ. C’est lui, aussi, qui glorifiera sur la terre le Christ, le Christ mystique. Cette magnifique activité, le Saint-Esprit l’exerce dans l’Eucharistie (Ev.). Maintenant, dans le Saint-Sacrifice, nous recevons de nouveau ce que nous promet l’avant-messe. Nous chantons avec reconnaissance, au moment où nous entrons dans le sacrifice (Off.), le cantique pascal : “ Que de grandes choses le Seigneur a faites à notre âme ! ” (C’est la repetenda dans le psaume complet). Dans l’Eucharistie, cet Esprit victorieux vient sur nous et fait de nous des vainqueurs du monde, des martyrs. Nous chantons à la Communion : “ Quand le Paraclet, l’Esprit de vérité, viendra ”. C’est maintenant, en effet, au moment de la Communion, qu’il descend en nous.
            
3. De la patience. — Après nous avoir rappelé le “ petit délai ” dont parle le Seigneur, l’Église nous entretient aujourd’hui de la patience. Elle nous recommande, cette semaine, la pratique de cette vertu, d’une manière toute spéciale, et elle nous fait lire un beau passage du livre de saint Cyprien sur la patience. Le saint nous propose, d’abord, l’exemple de Dieu et du Christ : “ Cette vertu nous est commune avec Dieu. C’est en lui que cette vertu a son principe, c’est de lui qu’elle tire sa gloire et sa dignité. Dans son origine et dans sa grandeur, la patience a Dieu comme auteur. L’homme doit aimer une chose qui est chère à Dieu. Un bien que Dieu aime est recommandé par sa divine majesté. Si Dieu est notre Seigneur et notre Père, attachons-nous à la patience de celui qui est à la fois notre Seigneur et notre Père. Il faut, en effet, que les serviteurs obéissent et que les enfants ne soient pas dégénérés ”. Saint Cyprien parcourt toute la vie du Seigneur et nous montre partout sa patience, surtout dans sa Passion. La Sainte Écriture de l’Ancien comme du Nouveau Testament est également remplie d’exemples de patience. Enfin, saint Cyprien étudie la patience par rapport à la vie chrétienne. Elle donne la persévérance, elle préserve des vices, elle fait naître l’amour, elle triomphe de la haine et de la discorde, elle fait surmonter les contrariétés de la vie. “ L’efficacité de la patience est très étendue. Dans toutes nos actions, rien ne peut s’achever sans recevoir sa force de la patience. C’est la patience qui nous recommande et nous garde à Dieu. C’est elle qui tempère la colère, qui réfrène la langue, qui gouverne l’esprit, qui conserve la paix, qui. ,dirige la bonne éducation, qui brise l’impétuosité des passions, qui réprime la violence de l’orgueil, qui éteint l’incendie des haines, qui maintient dans ses limites la puissance des riches, qui adoucit la détresse des pauvres, qui protège la bienheureuse intégrité des vierges, la laborieuse chasteté des veuves et l’amour indestructible des gens mariés ; elle rend humble dans la prospérité, fort dans l’adversité, doux en face des injustices et des injures. Elle apprend A pardonner vite à ceux qui commettent une faute ; si l’on commet soi-même une faute, elle enseigne à demander, longtemps et avec instance, le pardon. Elle combat les tentations, elle supporte les persécutions, elle conduit à leur perfection les souffrances et le martyre. C’est elle qui affermit les fondements de notre foi, c’est elle qui favorise le développement de notre espérance. Elle dirige toutes nos actions, elle nous rend capables de suivre la voie du Christ en nous faisant marcher dans sa patience ”.
             
4. Lecture d’Ecriture (Jacq., I, 1-16). -L’Epître de saint Jacques le Mineur est très instructive et très édifiante ; elle est en même temps facile à comprendre. Elle fait sans doute partie des plus anciens écrits du Nouveau Testament et doit remonter à l’époque qui précède de peu le concile de Jérusalem. Elle traite de la pratique de la vie chrétienne. Le passage qui nous occupe traite de la patience : “ Voyez un sujet de joie, mes frères, dans les épreuves de toutes sortes qui vous assaillent. Vous le savez, si votre foi est véritable, elle produit la patience ; mais la patience doit vous mener à la perfection ”. Il parle ensuite de la véritable sagesse (c’est-à-dire de la vie vertueuse) : “ Si la sagesse fait défaut à quelqu’un d’entre vous, qu’il la demande à Dieu, lequel la donne à tous, simplement, sans faire de reproche. Mais qu’il la demande avec foi, sans hésiter. Car celui qui hésite est semblable au flot de la mer agité et ballotté par le vent. Que cet homme-là ne s’imagine pas qu’il recevra quelque chose du Seigneur : homme à deux âmes, inconstant dans ses voies. Que le frère pauvre se glorifie de son élévation et que le riche mette sa gloire dans son abaissement !... Heureux l’homme qui supporte l’épreuve !... Lorsque quelqu’un est tenté, qu’il ne dise pas : c’est Dieu qui me tente… Chacun est tenté par sa propre convoitise... Ne vous abusez pas, mes frères bien-aimés. Tout don excellent, toute grâce parfaite descend d’en haut, du Père des lumières, en qui n’existe aucune vicissitude, ni ombre de changement ”