MERCREDI DES QUATRE-TEMPS (semi-double).

Station à Sainte Marie Majeure
    
Le saint-Esprit dans son Église.
    
1. Les Quatre-Temps d’été étaient primitivement une fête d’action de grâces pour la moisson qui s’achève alors dans les pays méditerranéens. Aujourd’hui, la liturgie ne fait plus que de faibles allusions à la moisson. — Cf. les leçons du samedi des Quatre-Temps. Au contraire, le froment et la moisson sont devenus des symboles de la vie surnaturelle. Notre froment est le “ pain de vie ” eucharistique (Evang. d’aujourd’hui). Notre moisson est la moisson des âmes que le Saint-Esprit apporte à son Église (“ alors, les greniers se remplissent de grains et les celliers regorgent de vin et d’huile ”) (leçon de vendredi). La semaine des Quatre-Temps est toujours un temps de renouveau spirituel, d’examen de conscience et de résolution. Justement, la semaine de la Pentecôte permet de faire revivre le sens primitif et l’impression de joie reconnaissante d’autrefois. Car ce n’est pas la pénitence, mais la reconnaissance qui constitue la pensée des Quatre-Temps. On peut jeûner aussi par reconnaissance. D’une manière générale, habituons-nous à cultiver dans la vie chrétienne les valeurs positives plutôt que les valeurs négatives, plutôt la conscience de notre qualité d’enfants de Dieu que la conscience de notre état de pécheurs. — Le mercredi des Quatre-Temps est un jour consacré, à Marie, un jour de recueillement intime ; le vendredi est un jour de pénitence et le samedi un jour d’action de grâces. Nous ferons, par conséquent, un bref retour sur le trimestre écoulé. Ces trois mois passés furent sans doute l’époque la plus importante de toute l’année liturgique : le Carême et le temps pascal ! Que de grâces nous avons reçues ! Comment en avons-nous usé ? Que seront nos fruits et notre moisson ? “ Je médite sur tes commandements qui me sont très chers ”. Cette antienne d’Offertoire se rencontre tous les mercredis de Quatre-Temps et nous présente ce jour comme un jour de recueillement spirituel.
    
2. La messe (Deus dum) nous donne une belle suite de pensée. L’Introït présente ce thème : la voie de l’Église dirigée par le Saint-Esprit à travers le temps. “ O Dieu (Saint-Esprit), quand tu marchais devant ton peuple, lui préparant les voies et demeurant au milieu de lui, Alleluia, la terre trembla et le ciel ruissela, Alleluia, Alleluia ”. Pourrait-on trouver une plus belle image pour caractériser l’action du Saint-Esprit dans l’Église ? C’est cette idée qui est exprimée dans les trois leçons dont les oraisons donnent le commentaire. Dans la première leçon, nous entendons le sermon de Pentecôte de saint Pierre. Il décrit, en empruntant les paroles du Prophète Joël, l’action du Saint-Esprit dans l’Église : “ Dans les derniers jours, je répandrai de mon Esprit sur toute chair, et vos fils et vos filles prophétiseront, vos jeunes gens auront des visions et vos vieillards des songes... ” Nous nous demandons maintenant si cette parole prophétique s’est accomplie dans l’Église. L’œuvre du Saint-Esprit est double : extérieure et intérieure, ou bien miraculeuse et salutaire. La seconde leçon nous parle de l’action extérieure et miraculeuse du Saint-Esprit. “ On portait même les malades sur les rues et on les plaçait sur des lits, afin que, lorsque Pierre passerait, son ombre au moins tombât sur les malades et qu’ils fussent délivrés de leurs maladies. Même des villes voisines... on amenait des malades et des possédés, et ils furent tous guéris ”. C’est là l’action extérieure du Saint-Esprit. Quand l’organisation de l’Église eut progressé, ces miracles se firent plus rares, mais ils ne disparurent jamais entièrement. Les miracles seront toujours une preuve que le Saint-Esprit dirige visiblement son Église. Cependant, l’action miraculeuse de l’Esprit-Saint n’est pas la principale. Beaucoup plus importante est son action intérieure, invisible, salutaire. Cette action se produit surtout par les sacrements et les autres moyens de grâce, groupés autour de l’Eucharistie. Elle se produit, aussi, par l’attraction de la grâce. C’est dans ce sens que nous comprenons l’Évangile. Le Seigneur parle de l’action intérieure du Saint-Esprit quand il dit : Il Personne ne vient à moi si mon Père qui m’a envoyé ne le tire... Il est écrit dans les Prophètes (Is. LIV, 13) : Ils seront tous disciples de Dieu ”. Mais le Saint-Esprit agit surtout dans la Sainte Eucharistie : “ Celui qui mange de ce pain aura la vie éternelle ; le pain que je donnerai, c’est ma chair pour la vie du monde ”. (L’Église souligne ce passage dans la prière des Heures). Dans l’Eucharistie, le Saint-Esprit crée, maintient et développe la vie divine. C’est là qu’il tisse la robe nuptiale de l’Église, la robe nuptiale de l’âme. Quand ces robes nuptiales seront terminées, l’œuvre du Saint-Esprit sur la terre sera achevée ; alors, l’Église et l’âme entreront dans la salle du banquet céleste et célébreront leurs noces éternelles. Alors, régnera l’éternelle paix que l’Esprit-Saint verse déjà dans nos âmes, cette paix que nous ressentons, surtout, au Saint-Sacrifice. “ Je vous laisse la paix, je vous donne ma paix, Alleluia, Alleluia ” (Comm.). Les deux oraisons sont parmi les plus belles prières au Saint-Esprit. “ Nous te prions, Seigneur, fais que le Paraclet, qui procède de toi, illumine nos esprits et, selon la promesse de ton Fils, nous introduise dans toute vérité ”. “ Fais que le Saint-Esprit vienne à nous et, par sa demeure en nous, daigne faire de nous un temple de sa majesté ”.
    
A la prière des Heures, saint Augustin nous donne de profondes considérations sur ce passage de l’Évangile : Personne ne vient à moi si mon Père ne le tire. “ Ne va pas croire que tu es “ tiré ” contre ta volonté libre. Le cœur, en effet, peut aussi être tiré par l’amour... Si le poète (Virgile) a pu dire : chacun est tiré par son plaisir, il s’agit non de la nécessité, mais du plaisir, non de la contrainte, mais de la joie. Avec combien plus de force devons-nous dire : l’homme est tiré vers le Christ quand il se plaît à la vérité, quand il se plaît à la béatitude, quand il se plaît à la justice, quand il se plaît à la vie éternelle, car c’est là tout le Christ ! Car si le corps a ses plaisirs, l’âme n’a-t-elle pas les siens ? Qu’on me donne quelqu’un qui aime, et il comprendra ce que je dis. Qu’on me donne quelqu’un qui désire, qu’on me donne quelqu’un qui a faim, qu’on me donne un voyageur altéré dans ce désert et qui soupire vers la source de l’éternelle patrie, qu’on me donne un tel homme et il comprendra ce que je veux dire. Montre à la brebis une branche verte et tu la tires. Montre à un enfant des noix et tu le tires. S’il court, c’est qu’il est tiré ; il est tiré par l’amour, il est tiré sans contrainte corporelle ; c’est par les liens du cœur qu’il est tiré. Si donc des choses terrestres, qui paraissent à ceux qui les aiment des délices et des voluptés nous tirent en vertu du principe : Chacun est tiré par son plaisir, comment le Christ, qui a été révélé par le Père, ne nous tirerait-il pas ? ”