MERCREDI DES QUATRETEMPS

Station à Sainte-Marie Majeure
     
Morse et Elie jeûnent.
     
1. Prédicateurs de carême. — Nous voyons devant nous, aujourd’hui, quatre prédicateurs de carême ; le Christ, la Sainte Vierge, Moïse et Élie. Ils nous disent comment nous devons observer le Carême. Dimanche dernier, nous avons vu comment le Christ jeûna pendant quarante jours et fut ensuite tenté par le diable. Le jeûne et la tentation sont en étroite relation. Le jeûne fut la préparation au combat contre le prince de ce monde. Aujourd’hui, le Seigneur nous parle de l’entrée du diable dans la demeure de l’âme. Le Christ nous enseigne l’importance du jeûne dans le combat contre le démon, dans le combat contre notre nature inférieure. “ Par le jeûne corporel, tu réprimes les vices, “ dit la Préface du Carême. Il faut sans cesse répéter que c’est là le travail principal du carême. Tous les autres exercices seront sans valeur si nous ne triomphons pas du diable. Marie, qui est le coryphée dans le sacrifice d’aujourd’hui, nous prêche la soumission à la volonté de Dieu. L’Évangile nous présente Marie dans une situation subordonnée. Le Christ laisse de côté sa Mère ; son regard embrasse ses disciples, il les appelle sa mère et ses frères, s’ils “ accomplissent la volonté de son Père céleste. ” C’est Marie qui nous précède, à l’Offertoire, et qui chante ces paroles : “ Je veux méditer sur tes commandements, je les aime extrêmement. ” — Moïse nous apprend à utiliser le jeûne de quarante jours comme un temps d’union avec Dieu et de prière. La prière et le jeûne se complètent mutuellement. Si nous voulons nous entretenir avec Dieu, il faut imposer silence à la chair, au monde, à la nature. Le Christ ne nous dit-il pas : “ Cette espèce (de mauvais Esprits) ne peut être chassée que par la prière et le jeûne ” Élie jeûne dans son voyage à travers le désert et, fortifié par la nourriture céleste, il marche, pendant quarante jours, jusqu’au mont Horeb, la montagne de Dieu. — Ainsi, chacun des quatre prédicateurs de Carême nous fait voir ce temps de grâces sous un aspect différent : le jeûne dans le combat contre le diable, le jeûne dans l’accomplissement des commandements, le jeûne et la prière, le jeûne sur le rude chemin de la vie.
     
Considérons encore que la messe d’aujourd’hui est le point de jonction qui relie les trois premiers dimanches de Carême. Le premier dimanche, nous voyons le Christ jeûner pendant quarante jours ; aujourd’hui, on nous raconte la même chose de Moïse et d’Élie. Le dimanche suivant, nous voyons le Christ, Moïse et Élie r’ ; ;unis au “moment de la Transfiguration. La liturgie veut nous dire par là : la Loi, les Prophètes et l’Évangile nous enseignent cette grande vérité : La voie qui mène à la Transfiguration (à la fête de Pâques) passe par les quarante jours de jeûne.
     
2. L’église de station : Sainte-Marie Majeure. — Le mercredi des quatre semaines de Quatre-Temps, l’office de station se célèbre, depuis l’antiquité, dans la plus grande église romaine de Marie. Cette basilique est du IVe siècle, elle fut reconstruite sous le pape Sixte III (431-440) et, à l’occasion de la définition du concile d’Éphèse qui proclamait la véritable maternité divine de Marie, elle fut dédiée à la Sainte Vierge. Il est probable que, dans la seconde moitié du Ive siècle, la solennité des Quatre-Temps fut réorganisée et qu’on choisit dès lors, pour l’office de station, les trois plus grandes églises romaines (Sainte-Marie Majeure, les Saints-Apôtres, Saint-Pierre). Nous nous rendons donc aujourd’hui dans la plus grande et la plus vénérable église mariale du monde. On ne peut pas nier qu’il y ait une relation entre la messe et l’église de station, dans l’apparition de Marie dans l’Évangile. Elle se présente comme le type de l’Église. L’Église, en tant que mère de ceux qui font la volonté du Père céleste, est aussi la mère du Christ.
     
3. Le thème des catéchumènes. — L’avant-messe doit donner aux catéchumènes eux-mêmes un pressentiment de la voie qu’il leur faudra suivre. S’ils peuvent déjà voir, dans la montée de Moïse et d’Élie sur la montagne sainte après quarante jours de jeûne, une image de leur baptême, l’Évangile parle, d’une. manière toute spéciale, de leur élection. Le peuple élu des Juifs est rejeté. Par contre, les païens sont appelés. Ce n’est plus la descendance charnelle qui est décisive, mais l’esprit intérieur de l’homme : “ celui qui fait la volonté de mon Père. “ C’est là la résolution des catéchumènes : ils veulent faire la volonté du Père. Ils veulent briser avec ce qu’ils ont aimé jusqu’ici, ils veulent vivre une nouvelle vie. C’est ainsi qu’ils trouvent le Christ, deviennent ses frères et ses sœurs et sont, en lui, frères et sœurs entre eux. Ils entrent ainsi dans la famille divine, dans laquelle se trouvent les trésors de la grâce et du salut. “ Les habitants de Ninive (les païens) se lèveront au jugement contre cette génération (contre le peuple élu d’Israël) et la condamneront. “ Les païens, les catéchumènes sont donc le peuple élu, le peuple de la grâce, les héritiers de la bénédiction. Mais l’allusion au sort du peuple d’Israël est, en même temps, pour les catéchumènes, un sérieux avertissement. Ils doivent se rendre dignes de leur vocation par une fidélité complète.
      
4. Le thème de la Passion. — Les deux antiennes du lever et du coucher du soleil nous parlent de Jonas. “ De même que Jonas a été trois jours et trois nuits dans le ventre du poisson, de même le Fils de l’Homme sera dans le sein de la terre ” (Ant. Magnificat). “Le signe de Jonas est la figure de la mort du Christ ” (Saint Ambroise dans le bréviaire d’aujourd’hui).
Nous chantons de nouveau un des beaux répons :
“ Romps ton pain à ceux qui ont faim,
Les indigents et les abandonnés, conduis-les dans ta maison.
Alors la lumière se lèvera comme l’éclat du matin.
Et ta justice marchera devant ta face.
Quand tu verras un homme nu,
Revêts-le
Et ne méprise pas ta chair. “
5. Psaume 5. — Le fidèle se rend le matin à l’église. — De l’auteur de ce psaume nous ne savons rien. Cependant la situation du cantique est claire pour nous. Nous l’attribuons à un homme (prêtre ou lévite) qui, de grand matin, monte au temple pour le sacrifice et la prière. En s’y rendant, il récite cette prière du matin. Cette situation peut très bien s’appliquer à la vie de prière du chrétien et nous pouvons intituler ce cantique : “Le fidèle se rend le matin à l’église. ” Le psaume contient plusieurs pensées qui conviennent parfaitement à une prière du commencement du jour. Le psaume nous paraît divisé en cinq strophes, qui, même extérieurement, sont construites de la même manière. Seulement la première strophe est un peu plus longue et semble vouloir donner le mouvement.
Seigneur, prête l’oreille à mes paroles et entends mes soupirs.
Sois attentif à mes supplications, mon Roi et mon Dieu.
Dès le matin je crie vers toi,
Ecoute mes cris, Seigneur ;
Dès le matin je me tiens devant toi et j’attends.
 
Tu n’es pas un Dieu qui prenne plaisir au mal,
Aucun méchant ne peut habiter avec toi, les insensés ne subsistent pas devant tes yeux.
Tu hais tous les artisans d’iniquité, tu fais périr les menteurs.
Les hommes de sang et de fraude sont en horreur devant toi, Seigneur.
   
Pour moi, je me réjouis de ta grande miséricorde,
J’ai droit d’entrer dans ta maison, de me prosterner avec crainte dans ton sanctuaire ;
Seigneur, conduis-moi dans ta justice, et aplanis la voie sous mes pas.
Il n’y a point de vérité dans leur bouche, leur cœur est plein de malice, leur gosier est un sépulcre ouvert, Ils font leur langue caressante ;
Châtie-les, ô Dieu,
Qu’ils soient renversés dans leurs intrigues ; à cause de leur grande méchanceté, rejette-les de toi, car ils sont en révolte contre toi, Seigneur.
   
Mais que se réjouissent tous ceux qui se confient en toi ; qu’ils soient dans une perpétuelle allégresse, tu les protèges.
Ils se glorifient en toi, ceux qui aiment ton nom, car tu bénis le juste.
   
Et semblable à un bouclier, Seigneur, ta grâce nous couvre.