LECTURE D’ÉCRITURE - QUATRIÈME SEMAINE DE NOVEMBRE

Les petits Prophètes
Samedi soir : Notre mère l’Église nous fait chanter une antienne vespérale qui nous présente en termes magnifiques le Christ Roi et qui exprime aussi très bien la pensée de la parousie :
“ Toi qui es assis sur le trône céleste et qui plonges du regard dans les abîmes, Seigneur, Roi des rois, toi qui pèses les montagnes et qui tiens la terre dans ta main, exauce-nous, Seigneur, dans nos gémissements. ”
Cette antienne est tirée de Daniel et non pas, comme précédemment, des lectures de la semaine qui commence.
Dimanche (Osée, 1 et II) : Parmi les Prophètes dits petits qui nous ont laissé des écrits (des plus anciens, comme Élie et Élisée, nous n’avons rien), Osée est l’un des plus anciens ; il exerça son action dans le royaume d’Israël au VIlle siècle avant Jésus Christ. Son livre contient des appels à la pénitence adressés au peuple juif déchu et entièrement adonné au culte des idoles ; son style très imagé le range parmi les productions les plus importantes de la littérature hébraïque. Le livre se divise en deux parties : dans la première (ch. 1-3) le prophète expose, selon l’ordre qu’il a reçu, deux actions symboliques destinées à exprimer la réprobation et la rédemption future d’Israël ; dans la seconde partie (ch. 4-14), sont réunies cinq exhortations à la pénitence. Le premier des récits symboliques doit agir sur le peuple juif (mais aussi sur les enfants infidèles de l’Église) à la manière d’une exhortation à la pénitence : le prophète doit s’unir par le mariage à une ancienne prostituée. Un enfant qui lui naîtra recevra le nom de “ Sans pitié ” ; un autre, celui de “ Pas mon peuple ”. Dieu lui apprend lui-même, en un langage détaillé et poétique, la signification de cet ordre. Israël est l’épouse infidèle de Dieu qui s’est livrée à la luxure de l’esprit, c’est-à-dire au culte des idoles ; c’est pourquoi elle ne trouvera pas de pitié et ne sera pas reconnue comme le peuple de Dieu (1, 9 ; II, 3). C’est seulement quand Israël reviendra à une union pure et chaste avec Dieu qu’il retrouvera grâce. Le nombre des “ enfants d’Israël ” deviendra semblable au sable de la mer. Dieu conclura avec Juda une alliance éternelle : “ Je me fiancerai à toi pour toujours... dans la justice et l’équité, dans la grâce et la pitié ” (II, 19). J’aurai pitié de celle qui se nomme “ Sans pitié ”, et je dirai à celle qui se nomme “ Pas mon peuple” : Tu es mon peuple ! et elle me dira : Tu es mon Dieu ! ” Lire aussi la première leçon de l’office du vendredi-saint (v. le Missel).
Lundi (Osée, XIV) : Un appel à la pénitence ! “ Reviens, Israël, à ton Seigneur, à ton Dieu ! Car tu es tombé dans la punition de tes péchés. Prenez des prières de supplication, revenez au Seigneur et dites-lui : Écarte toute iniquité, n’écoute que la bonté et nous dirigerons vers toi comme un sacrifice les prières de nos lèvres. Assur ne sera plus notre refuge ; nous ne monterons plus le cheval de guerre et nous ne dirons plus : Voilà nos dieux, l’ouvrage de nos mains ! Car tu as pitié de celui qui reste près de toi, de l’orphelin. C’est ainsi que je veux guérir leurs blessures, les aimer au-delà de toute mesure ; car ma colère s’est détournée d’eux. Je serai semblable à une rosée ; Israël poussera comme un lis et ses racines s’étendront comme celles du Liban. Ses rameaux se développeront, sa gloire sera semblable à celle de l’olivier et son parfum à celui du Liban. Qu’ils reviennent, ceux qui sont assis à l’ombre ; qu’ils se nourrissent de froment et qu’ils croissent comme un cep. Son souvenir sera comme le vin du Liban. Éphraïm, qu’ai-je encore affaire avec vos idoles ? Je l’exaucerai moi-même, je le ferai croître moi-même comme un cèdre verdoyant. C’est moi qui te ferai porter du fruit. Qui est sage et comprend cela ? Qui a l’intelligence pour le savoir ? Oui, droites sont les voies du Seigneur, et les justes les suivent ; mais les pécheurs y trouvent leur ruine. ”
Mardi (Joël, 1 et II) : Le prophète Joël est contemporain du prophète Osée. Son livre appartient à l’époque florissante de la littérature hébraïque. Les différentes parties de l’ouvrage se présentent dans l’ordre suivant : Le prophète annonce sa ruine au royaume de Juda sous l’image d’une invasion de sauterelles (I, 1-2, II) ; ensuite il invite les prêtres et le peuple à faire pénitence (II, 12-17) ; puis il décrit le rétablissement du royaume (II, 18-32) et, enfin, le jugement dernier et la splendeur de la nouvelle Jérusalem (III). Nous lisons aujourd’hui le beau et célèbre passage utilisé par l’Église le mercredi des cendres comme introduction au carême (on le trouvera au Missel). — Si le peuple fait vraiment pénitence, Dieu aura pitié de lui et il lui enverra le Rédempteur et le Saint-Esprit. Le passage suivant est messianique : “ Soyez dans l’allégresse et réjouissezvous dans le Seigneur, votre Dieu, car il vous donne un docteur de la justice... Il (11,23). “ Après cela, voici ce qui arrivera : Je répandrai mon Esprit sur toute chair ; vos fils et vos filles prophétiseront ; vos vieillards auront des songes et vos jeunes gens es visions. Meme sur mes serviteurs et mes servantes je répandrai mon Esprit en ces jours-là” (II, 28-29). Ce passage a inspiré saint Pierre dans son discours de la Pentecôte sur le Saint-Esprit. (C’est pourquoi Joël est appelé le prophète du Saint-Esprit). Le jugement vient sur les méchants : “ Je ferai paraître des prodiges dans le ciel et sur la terre, du sang et du feu en colonnes de fumée. Le soleil se changera en ténèbres et la lune en sang avant qu’arrive le jour du Seigneur, grand et terrible.
Quiconque invoquera le nom de Dieu sera sauvé ; car c’est sur la montagne de Sion et à Jérusalem que sera le salut... ” (II, 30-32). Ce passage convient bien à cette époque de l’année liturgique (la fin).
Mercredi (Joël, III) : Le prophète décrit en un langage poétique le jugement dernier et la splendeur de la nouvelle Jérusalem : “ En ces jours et dans le temps où je ramènerai les captifs de Juda et de Jérusalem, j’assemblerai tous les peuples et je les ferai descendre dans la vallée de Josaphat ; et là j’entrerai en jugement avec eux à cause de mon peuple et de mon héritage d’Israël... Les peuples se lèveront et descendront dans la vallée de Josaphat ; car c’est là que je veux siéger pour juger tous les peuples d’alentour. Mettez la faucille, car la moisson est mûre ; venez et foulez, car le pressoir est plein ; les cuves débordent, car la méchanceté est à son comble. Des peuples et des peuples sont dans la vallée de la décision. Le soleil et la lune se sont obscurcis, les étoiles ont voilé leur éclat. Et le Seigneur rugira de Sion et fera retentir sa voix de Jérusalem, si bien que le ciel et la terre trembleront. Mais le Seigneur est l’espérance de son peuple et la protection des enfants d’Israël. Alors vous saurez que je suis le Seigneur, votre Dieu, moi qui habite sur Sion, ma montagne sainte ; et Jérusalem sera sainte et aucun étranger n’y passera plus. En ce temps, les montagnes dégoutteront de douceur et les collines laisseront couler du lait. Dans tous les ruisseaux de Juda l’eau coulera à flots ; une source sortira de la maison du Seigneur et arrosera les vallée des épines... et le Seigneur habitera sur Sion. Il Cette lecture, elle aussi, appartient bien à cette époque de l’année liturgique. En traits brefs, mais expressifs, le prophète nous peint les fins dernières : le jugement et la Jérusalem céleste. Nous voyons comment l’Église adapte avec intention les livres prophétiques à ces dernières semaines.
Jeudi (Amos) : Amos appartient lui aussi aux plus anciens des petits prophètes qui nous ont laissé des écrits. Il était pâtre de profession et se manifesta dans le royaume d’Israël. Bien que n’ayant pas fait d’études, il est un maître de l’éloquence prophétique (saint Augustin, lui-même un grand orateur, l’apprécie beaucoup). Il y a dans son livre quantité de magnifiques images et allégorie empruntées à la nature et à la vie. des pâtres. Ses prophéties concernent, dans la première partie, les peuples voisins (ch. 1 -6), et, dans la deuxième partie, la réprobation d’Israël (ch. 7-9). Nous lisons maintenant un texte messianique où est prédite l’admission des païens dans le royaume de Dieu : “ En ce jour-là je relèverai la chaumière de David qui est tombée ; je réparerai les brèches de ses murs et, ce qui était tombé, je le rebâtirai ; je la rebâtirai comme elle était aux premiers jours afin qu’elle possède le reste de l’Idumée et tous les peuples, parce que mon nom a été invoqué sur eux... Voyez, des jours viennent... où le laboureur se joindra au moissonneur et celui qui foule le raisin à celui qui sème ; les montagnes dégoutteront de douceur et toutes les collines seront cultivées. Et je ramènerai les captifs de mon peuple et ils rebâtiront les villes dévastées et les habiteront ; ils planteront des vignobles et en boiront le vin ; ils feront des jardins et en mangeront les fruits. Je les planterai sur leur sol et ils ne seront plus arrachés de leur pays que je leur aurai donné, dit le Seigneur ” (IX, 11-15).
Vendredi (Jonas,I-II) : Jonas est le plus ancien parmi les prophètes qui ont écrit (environ 800 avant J.-C.) Des petits prophètes, il est le plus connu dans le Nouveau Testament et aussi dans la liturgie ; le Christ lui-même parle de lui (Matth., XII, 40, 41) ; c’est surtou1 son séjour dans le ventre du poisson qui fait de lu une figure très connue de la résurrection du Sauveur (l’une des images que l’on rencontre le plus fréquemment dans les catacombes romaines). Jonas avait reçu de Dieu la mission de prêcher la pénitence dans la ville corrompue de Ninive ; mais, ne voulant pas la perte de Ninive, il s’éloigna de la face de Dieu et montant sur un bateau pour gagner Tharsis par mer “ Alors Dieu envoya sur la mer un vent puissant, de telle sorte qu’il s’éleva une violente tempête et que le bateau fut en danger de sombrer. Les matelots, effrayés, firent appel chacun à son dieu ; mais Jonas était descendu dans la cale du bateau et s’y était profondément endormi. Alors le pilote vint le trouver et lui dit : “ Quoi ! tu t’abandonnes au sommeil ? Lève-toi et invoque ton Dieu ; peut-être Dieu se souviendra-t-il de nous et nous ne périrons pas. ” Et ils se disaient l’un à l’autre : “ Levons-nous et jetons les sorts afin de savoir d’où nous vient ce malheur ! ” Ils jetèrent les sorts et le sort tomba sur Jonas. Ils lui dirent donc : “ Dis-nous d’ou nous vient ce malheur ? Quelle est ta profession ? Quel est ton pays ? Où vas-tu ? ” Il leur répondit : “ Je suis Hébreu et j’adore le Seigneur le Dieu du ciel qui a créé la mer et la terre ferme. Alors ces hommes furent épouvantés et lui dirent “ Pourquoi as-tu fait cela ? ” Ils avaient appris en effet qu’il fuyait la face de Dieu, car il le leur avait dit. Ils lui dirent : “ Que faut-il faire pour que la mer nous laisse ? ” Car la mer se soulevait toujours de plus en plus. Il leur répondit : “ Prenez-moi et jetez-moi à la mer ; : alors la mer vous laissera, car je sais que c’est à cause de moi que cette grande tempête est venue sur vous. ” Alors les hommes se mirent à ramer pour gagner le rivage ; mais ils ne le purent pas, car la mer se soulevait toujours de plus en plus. Ils prirent donc Jonas et le jetèrent à la mer ; et la mer s’apaisa. Mais, dans leur frayeur extrême, les matelots invoquèrent Dieu, offrirent des victimes et firent des vœux. Alors le Seigneur fit venir un grand poisson pour engloutir Jonas. Et Jonas demeura dans le ventre du poisson trois jours et trois nuits. Dans le ventre du poisson, Jonas priait le Seigneur... Alors, sur l’ordre de Dieu, le poisson vomit Jonas sur la terre. ”

Samedi (Jonas, III-IV) : Jonas fut envoyé pour la seconde fois à Ninive : “ Et la parole du Seigneur fut adressée pour la seconde fois à Jonas en ces termes : “ Lève-toi, va à Ninive, la grande ville, et annonce-lui la parole que je te dirai. ” Jonas se leva et alla à Ninive sur l’ordre du Seigneur. Or Ninive était une grande ville de trois jours de chemin. Jonas fit dans la ville une journée de chemin et s’écria : “ encore quarante jours et Ninive sera détruite. ” Les gens de Ninive crurent en Dieu, publièrent un jeûne et se revêtirent d’habits de pénitence, du plus grand jusqu’au plus petit. La nouvelle en parvint au roi lui-même ; il se leva de son trône, déposa ses vêtements (royaux), revêtit un habit de pénitence et s’assit sur la cendre. En même temps, il fit proclamer dans Ninive comme décret du roi et de ses princes : “ Que ni hommes ni bêtes de somme, ni bœufs ni brebis ne mangent, ne paissent, ne s’abreuvent d’eau. Que les hommes et les bêtes portent des vêtements de pénitence, et que l’on implore à haute voix le Seigneur ; que chacun se détourne de sa mauvaise voie et de l’injustice dont ses mains sont souillées. Dieu se tournera peut-être vers nous, pardonnera et laissera tomber la fureur de sa colère, de sorte que nous ne périssions pas. ” Le Seigneur vit tout ce qu’ils faisaient, qu’ils se détournaient de leur mauvaise voie, et il renonça au mal dont il les avait menacés et il ne le fit pas tomber sur eux. Cela mécontenta fort Jonas et il en fut irrité. Il s’adressa au Seigneur en disant : “ Je te le demande, Seigneur, n’est-ce pas là ce que je disais lorsque j’étais encore dans ma patrie ? C’est pourquoi j’ai pris les devants en m’enfuyant à Tharsis ; car je sais que tu es un Dieu clément et miséricordieux, lent à la colère et disposé à la pitié et qui pardonne le mal. Maintenant, Seigneur, je t’en prie, prends mon âme, car la mort est préférable pour moi à la vie. ” Mais le Seigneur lui répondit : “ Crois-tu avoir raison de t’irriter ? ” Alors Jonas sortit de la ville et s’assit à l’orient de la ville ; il se construisit une hutte de feuillage et s’y tint à l’ombre jusqu’à ce qu’il vît ce qui arriverait à la ville. Le Seigneur fit croître un pied de lierre qui se développa au-dessus de la tête de Jonas afin que son ombre fût sur sa tête et le protégeât, car il souffrait (de l’ardeur du soleil). Et Jonas éprouva une grande joie à cause du lierre. Mais Dieu envoya, le lendemain, au lever de l’aurore, un ver qui piqua le lierre, de telle sorte que celui-ci sécha. Après le lever du soleil, Dieu fit venir un vent brûlant et le soleil donna sur la tête de Jonas qui en vint presque à défaillir. Il souhaita alors mourir et dit : “ La mort est pour moi préférable à la vie. ” Mais le Seigneur dit à Jonas : “ Crois-tu avoir raison de t’irriter à cause du lierre ? ” Il répondit : “ J’ai raison de m’irriter jusqu’à la mort (jusqu’au bout). ” Mais le Seigneur répartit : “ Tu t’affliges au sujet du lierre qui ne t’a donné aucun mal, que tu n’as pas fait pousser, qui est venu en une nuit et qui a péri en une nuit : Et moi, je ne m’affligerais pas au sujet de Ninive, la grande ville dans laquelle il y a plus de cent vingt mille hommes qui ne savent pas distinguer entre leur droite et leur gauche, et quantité d’animaux ? ”