DIMANCHE ENTRE LE 2 ET 5 JANVIER OU 2 JANVIER - Le Saint Nom de Jésus (double de 2e classe)

Au nom de Jésus doivent fléchir les genoux tous ceux qui sont au ciel, sur la terre et dans les enfers ; et toute langue doit confesser que Notre-Seigneur Jésus-Christ est dans la gloire du Père. (Introït). 

Il n’a pas été donné d’autre nom, aux hommes sous le ciel, par lequel nous devions obtenir le salut. (Leçon). 

1. Considérations préliminaires. — Cette fête n’apporte aucun progrès dans l’évolution de l’année liturgique, ce n’est qu’un complément de la fête de la Circoncision. Au moment de la Circoncision, Notre Seigneur reçut le nom de Jésus comme l’ange l’avait annoncé auparavant. Le but de la fête est de faire considérer aux chrétiens la majesté du Saint Nom de Jésus. C’est une fête récente, dont l’origine est surtout la piété méditative. Nous en tirerons cependant des pensées liturgiques conformes à l’esprit antique du Christianisme. 

Que signifie originairement le nom ? Le nom devrait exprimer l’essence d’une chose. Ainsi Adam, au Paradis terrestre, donna à tous les animaux des noms conformes à leur nature intime. De même le nom de Dieu signifiait chez les Juifs son essence : Jahvé, c’est-à-dire : je suis Celui qui suis, l’Etre éternel. C’est pourquoi les Juifs avaient un si grand respect du nom de Dieu qu’ils n’avaient pas le droit de le prononcer. Ce respect est également inclus dans le Notre Père : “ Que ton nom soit sanctifié ”. Les personnes qui, dans l’histoire sainte,. ont joué un rôle important ont reçu leur nom de Dieu lui-même. Adam — l’homme de la terre, Ève — la mère des vivants ; Abraham — le père de beaucoup de peuples ; Pierre — le rocher. Le précurseur de Notre-Seigneur a reçu lui aussi un nom que Dieu lui imposa. La famille voulait à toute force lui donner le nom de son père, mais Élisabeth aussi bien que Zacharie manifesta ses exigences : Jean est son nom (Jean veut dire : la grâce de Dieu). 

Nous pouvons comprendre dès lors que le nom du Sauveur ne lui a pas été donné au hasard ni d’après le caprice des hommes, mais qu’il l’a reçu directement de Dieu. Car son nom devait exprimer son sublime ministère sur la terre. Nous lisons en effet dans l’Écriture que l’ange Gabriel annonça à la Vierge Marie le nom de Notre Seigneur : “ Tu lui donneras le nom de Jésus.” Et à saint Joseph, son père nourricier, l’ange dit encore davantage, il n’annonça pas seulement le nom, mais encore il en expliqua la signification : “ tu lui donneras le nom de Jésus, car il rachètera son peuple de ses péchés ; ” Ainsi donc Notre. Seigneur ne devait pas seulement être le Sauveur mais encore en porter le nom. Chez Notre Seigneur le nom exprime donc véritablement son essence. 

Voilà pourquoi ce nom doit être si saint pour les chrétiens. Toutes les fois que nous prononçons ce nom, nous devons incliner ta tête, car ce nom nous. rappelle à lui seul le plus grand bienfait que nous ayons jamais reçu : notre qualité de rachetés et d’enfants de Dieu. 

2. La messe (In nomine Jesu). — La messe est un sacrifice de louange en l’honneur du Saint Nom de Jésus. L’Introït nous donne une belle image d’adoration. Nous voyons le royaume de Dieu dans ses trois états : l’Église triomphante, l’Église militante et l’Église souffrante prosternées devant le Seigneur assis. sur son trône de gloire et dont le nom est Jésus. La collecte demande la vision éternelle au ciel du Seigneur dont nous honorons le nom sur la terre. La leçon est un passage du plaidoyer de saint Pierre après la guérison du paralytique : “ Au nom de Jésus-Christ de Nazareth que vous avez crucifié et que Dieu a ressuscité des morts, cet homme se tient devant vous guéri... Car Il n’a pas été donne aux hommes d’autre nom sous le ciel par lequel nous devions obtenir le salut. ” Le Graduel se rattache à la leçon. Celle-ci se terminait par ces mots : salvos fieri (recevoir le salut), le Graduel continue : Salvos fac nos (donne-nous le salut). L’Alleluia est vraiment un chant de louange (Alleluia veut dire : louez Dieu) : “ Ma bouche doit annoncer la louange du Seigneur et toute chair doit louer son saint nom. ” L’Évangile est le même que celui de la Circoncision : le Seigneur reçoit le nom de Jésus qui lui avait été donné auparavant par l’ange, avant sa conception. Les deux processions eucharistiques (Off. et Comm.) sont un chant de louange au nom du Seigneur. Les deux oraisons (Sec. et Postc.) caractérisent la sainte messe comme “ un sacrifice offert en l’honneur du nom de Jésus à la divine majesté ”, conception qui ajoute une note de piété plus personnelle à l’antique conception du sacrifice. — Prenons aujourd’hui de nouveau la résolution de dire avec respect et piété la conclusion habituelle des oraisons : “ par Jésus-Christ Notre Seigneur ”. 

3. La prière des Heures. Saint Bernard chante, dans les hymnes et les leçons, le Saint Nom de Jésus. “ Ce n’est pas en vain que le Saint Esprit compare le nom de l’Époux avec l’huile, en faisant dire par l’Épouse à l’Époux : Ton nom est comme une huile répandue. Car l’huile nous donne lumière, nourriture et onction, elle est une lumière, un aliment et un remède. Or voici que tout ceci s’applique au nom de l’Époux... Est-ce que Dieu ne nous a pas, dans la lumière de ce nom, appelés à sa lumière merveilleuse, SI bien que saint Paul dit : vous étiez auparavant ténèbres, maintenant vous êtes lumière dans le Seigneur ? Le nom de Jésus est aussi un aliment. N’es-tu pas réconforté toutes les fois que tu y penses ? Tout aliment de l’âme est sec qui n’est pas assaisonné de ce condiment. Jésus est un miel dans la bouche, une douce mélodie dans l’oreille,. un délice dans le cœur. C’est aussi un remède. Quelqu’un est il triste, que Jésus vienne dans son cœur et monte à ses lèvres et voici que, dès que s’est levée la lumière de son nom, tous les nuages disparaissent et la sérénité revient.” -Lecture d’Écriture (Act. Ap. chap. III et IV) : la guérison du paralytique est racontée tout au long. 

4. Le monogramme du Christ. Dans les conceptions des anciens, le nom étaient une expression de la personne. Cela nous explique que, dans l’art chrétien antique, pour désigner la personne du Seigneur, on employait son nom, mais sous la forme abrégée des initiales. Nous pouvons, dans l’art de la primitive Église, distinguer les signes suivants du nom du Seigneur. 

a) Le signe du Christ. Les plus anciens monuments attestant ce signe sont du troisième siècle ; le premier portant une date précise est une inscription funéraire sur la tombe d’un consul de l’an 389. Au troisième siècle, on peut établir les formes suivantes 1. des lettres séparées, IX (Jesus Christus), 2. des lettres placées l’une sur l’autre >I< = Jesus Christus. Dans l’archéologie, on appelle d’ordinaire ce signe le monogramme préconstantinien. = Christus est le monogramme constantinien. (Cela veut simplement dire que le premier est plus fréquent et que le second se rencontre après l’empereur Constantin). 3. La croix monogrammatique. Lorsque Constantin, après sa victoire au pont Milvius, plaça le monogramme du Christ sur les enseignes de l’armée (labarum), sur les casques et les monnaies, il utilisa un signe déjà courant chez les chrétiens. Cependant la vision de l’empereur avec cette promesse : “ In hoc signo vinces ” et l’accomplissement brillant de cette promesse élevèrent désormais ce signe jusqu’à en faire un symbole du triomphe du Christ. Depuis la victoire du christianisme, il trouva une large diffusion R dans tous les pays et fut employé de mainte façon. Ce ne fut plus seulement une simple abréviation, mais un symbole indépendant du Christ-Roi. Souvent le monogramme du Christ (tel qu’il était sur le labarum) fut entouré d’une couronne de laurier ou d’un cercle. Cela signifiait la souveraineté du Christ sur le monde ou le triomphe du Christ sur les ennemis de son royaume. Le monogramme reçut alors les formes les plus diverses et on y ajouta une riche ornementation. On aima placer autour du signe ou de la croix monogrammatique l’alpha et l’oméga (expression de l’éternité et de la divinité du Christ). 

b) Le signe du nom de Jésus. Le monogramme connu IHS est un symbole qui parmi un très petit nombre, est resté en usage jusqu’à nos jours. Il doit sa grande diffusion à saint Bernardin de Sienne, qui le fit placer sur ses étendards, entouré de douze rayons de soleil et surmonté d’une couronne. Depuis, ce signe est devenu le monogramme préféré du doux nom de Jésus. Saint Bernardin, par ses exhortations zélées. détermina plusieurs prêtres à placer ce monogramme sur les autels ou à le faire broder sur les aubes ou les chasubles. Sur ses conseils, plusieurs villes d’Italie inscrivirent ce monogramme en lettres gigantesques sur les murs extérieurs de leurs hôtels de ville, comme on peut encore le voir à Sienne. Quelle est l’origine de ce monogramme ? IHC est l’abréviation du grec IHSOUS. IHS est l’abréviation du latin IHESVS (forme du moyen âge). Comme on ne pouvait plus comprendre H comme un éta (è) grec, on dut ajouter un H. C est l’ancienne écriture du s grec (sigma). Dans l’antiquité chrétienne, ce monogramme n’est pas fréquent et ne doit pas remonter au-delà du Ve siècle. 

Plus tard, on a mal traduit IHS en l’interprétant comme : Jesus hominum Salvator, ou bien même Jesu humilis societas (ce qui l’a fait prendre comme symbole par l’Ordre des Jésuites). On aimait encore beaucoup cette interprétation : In Hoc Signo (sc. vinces). Du v (vinces) ajouté on fit plus tard trois aiguilles. 

c) Ichthus. L’ancienne Église connaissait aussi un anagramme très aimé pour désigner le Seigneur ; le fameux Ichthus. Le titre complet du Christ se formulait ainsi en grec : Jesous Christos, Theou Uios, Soter — Jésus-Christ, Fils de Dieu, Sauveur. Les premières lettres de ces saints mots donnent le mot grec : Ichthus, c’est-à-dire poisson. C’est la raison pour laquelle on aimait à représenter le Christ sous la forme d’un poisson. Ainsi l’abréviation aussi bien que la figure fut pour les premiers chrétiens une désignation secrète du Christ. Ils nommaient même le Seigneur “ le grand et pur poisson ” (Inscription funéraire d’Aberkios, vers 180 après J.-C.). Tertullien suppose connu ce symbolisme du poisson (vers 200 après J.-C.), quand il écrit : “ Nous (les chrétiens), à l’exemple de notre Ichthus, Jésus-Christ, nous sommes nés dans l’eau comme de petits poissons ” (Du baptême, chap. 1). 

d) Monogramme en forme de croix. Déjà, dans le signe abrégé du Christ, on pouvait voir un effort pour unir la croix au nom du Christ. La croix et le nom du Christ sont considérés comme des signes de la Rédemption :, mais encore comme une protection contre les attaques du démon. C’est pourquoi on avait coutume de peindre sur les portes et les maisons le monogramme de Jésus en lui donnant une forme de croix. Un des exemples les plus connus jusqu’ici est la disposition en forme de croix des deux mots fwV et zwh (lumière et vie) qui caractérisent le Christ lui-même dans saint Jean (VIII, 12 ; XI, 25). Le Christ est lumière et vie. Le Christ nous donne la lumière et la vie divines. La lumière et la vie, la liturgie souhaite, implore et communique ces deux biens pour les vivants et pour les morts. Nous pouvons dès lors comprendre que l’union en forme de croix de ces deux mots lumière et vie, fut, pour J’ancienne Église, un symbole parlant très aimé. On les rencontre sur les portes (Syrie), sur les tombeaux, mais aussi sur les ampoules, les petites lampes en terre cuite, les ustensiles domestiques.