9 JANVIER - Quatrième jour de l’Octave de l’Épiphanie (semi-d.)

Notre encens.

1. Prières des Heures. — Au second Nocturne, nous lisons un sermon très surnaturel du pape saint Léon I. Il nous est d’autant plus précieux qu’il fut prêché dans un centre très liturgique, à Saint-Pierre, pendant la célébration de l’antique fête de l’Épiphanie. “ Récemment, nous avons célébré le jour où la Vierge très pure enfanta le Rédempteur. Aujourd’hui, il nous est donné, mes très chers, par la solennité vénérable de l’Épiphanie du Seigneur, de continuer notre joie, afin qu’au milieu des mystères semblables de fêtes apparentées, la force de notre joie et l’ardeur de notre foi ne soient pas diminuées. Le salut de tous les hommes nous est indiqué par ce fait que l’enfance du Médiateur entre Dieu et les hommes fut manifestée au monde, alors qu’il était encore caché dans une petite ville chétive... C’est pourquoi apparut alors. aux trois Mages, en Orient, une étoile d’une clarté nouvelle, qui, plus brillante et plus belle que les autres. astres, attirait facilement le regard et l’esprit des. observateurs... Celui qui avait donné un signe du ciel accorda aussi à ceux qui le voyaient la grâce de le connaître. Et ce qu’il faisait connaître il le fit aussi chercher et, après les recherches, il le fit trouver. Les trois hommes suivent la conduite de la lumière céleste. Avec une attention soigneuse, ils suivent le signe qui leur montre le chemin et les précède. Par l’illumination de la grâce, ils furent conduits à la connaissance de la vérité. Ils croyaient que cette naissance du Roi que leur signalaient des renseignements. humains, ils devaient aussi la chercher dans la ville royale. Mais Celui qui avait pris la forme de l’esclave et qui n’était pas venu pour juger mais pour être jugé, avait choisi Bethléem pour sa naissance et Jérusalem pour ses souffrances. ” 

Au troisième Nocturne, nous entendons la quatrième et dernière partie du sermon de saint Grégoire (ainsi donc deux sermons historiques pour la fête de l’Épiphanie à Saint-Pierre, l’un vers 450, l’autre vers 600 ; transportons-nous par la pensée, en lisant ces sermons, dans ce temps vénérable). Le saint docteur nous parle de l’autre chemin ”. 

“ Les Mages nous donnent une leçon importante par ce fait qu’ils “ rentrèrent dans leur pays par un autre chemin ”. En agissant ainsi sur l’ordre d’en-haut, ils nous indiquent ce que nous devons faire nous-mêmes. Notre patrie est le Paradis, mais après avoir connu Jésus nous ne pouvons pas y parvenir en prenant “ le chemin par où nous sommes venus ”. Nous nous sommes éloignés de notre patrie par l’orgueil et la désobéissance en aimant ce qui est sensuel et en goûtant au fruit défendu. Nous devons donc “ retourner ” dans les larmes, dans l’obéissance, dans le mépris des sens et l’assujettissement de la chair. Nous revenons alors “ par un autre chemin dans notre patrie ”. Chassés des joies du Paradis à cause de la jouissance défendue, nous y sommes rappelés par les larmes. — Il est nécessaire par conséquent, mes très chers frères, que, dans une sainte crainte constante et dans une défiance salutaire, nous ayons toujours devant les yeux, d’une part, nos méfaits et, d’autre part, la sentence du dernier jugement. Songeons que le Juge sévère apparaîtra, le Juge qui nous menace de son jugement, mais nous en cache le jour ; le Juge qui inspire de la terreur aux pécheurs et cependant attend avec tant de mansuétude et ne retarde son retour que pour trouver en nous moins de sujet de condamnation. Punissons par des larmes de pénitence nos délits et, pour citer un psaume (psaume 94), allons au-devant de son retour avec la confession de nos fautes. Ne nous laissons aucunement prendre au piège des passions, ne nous laissons pas tenter par la joie malsaine du monde, il est toujours tout proche, le Juge qui a dit : “ Malheur à vous qui riez maintenant car vous serez dans le deuil et vous pleurerez ” (Luc, VI, 23). 

Au lever du soleil, nous chantons : “ Nous avons vu son étoile en Orient et nous sommes venus avec des présents l’adorer. ” 

Au coucher du soleil, nous chantons : “ Hérode demanda aux Mages : “ Quel signe avez-vous vu qui vous indique le Roi nouveau-né ? ” — “ Nous avons vu une étoile brillante dont l’éclat éclaire le monde. ” 

2. La messe. — C’est un tableau riche en couleur et de sens profond que le Prophète Isaïe déploie devant nous à la leçon de la messe. Nous voyons au-dessus de la ville de Jérusalem se lever le divin soleil, la gloire du Seigneur. Le Prophète éveille la cité de son sommeil nocturne, il l’invite à illuminer ses maisons. Il montre que toute la région environnante est plongée dans les ténèbres d’une nuit profonde ; au-dessus de Jérusalem seule se lève le soleil. De nouveau, il s’adresse à la ville. Lève tes yeux et vois : En troupes, voici qu’accourent les païens, ce seront tes nouveaux fils et tes nouvelles filles. Tu te réjouiras et t’étonneras de cette affluence. Ils viennent vers toi dans les costumes les plus divers : toutes les races et toutes les nations sont représentées ; un flot de chameaux et de dromadaires approche. Ces peuples ne viennent pas les mains vides, ils apportent de l’or et de l’encens. 

Telle est l’image. Nous savons ce qu’elle signifie. L’arrivée des Mages n’est que le premier accomplissement symbolique de cette prophétie. Jérusalem est la sainte Église que le Christ vient de fonder. Pendant que le reste du monde est plongé dans les ténèbres du paganisme, du péché et de l’ignorance, brille au-dessus de l’Église la divine lumière. Et maintenant commence la conversion des païens pour la joie de l’Église. Combien de fils et de filles lui naissent chaque année ! Ne voyons-nous pas que l’Épiphanie est la fête de l’Église des Gentils ? Le merveilleux tableau se complète sans cesse depuis la première Pentecôte jusqu’à la fin du monde. Heureux sommes-nous de faire partie de cette troupe élue qui, des ténèbres du monde, est venue à la lumière de l’Église. Ouvrons toutes grandes les portes de notre cœur et laissons y pénétrer les rayons de ce divin Soleil, qu’il en éclaire tous les recoins les plus intimes. Cependant ne venons pas les mains vides. Que l’or et l’encens soient nos présents royaux. L’or est notre vocation, notre travail ; l’encens notre prière et notre culte. Deux mots résument notre présent de fête : Ora et labora, prie et travaille. 

3. Notre encens. — Offrons aujourd’hui au Seigneur avec le second Mage, de l’encens. L’encens est dans la liturgie, le symbole de l’adoration du Christ. A la grand’messe, à l’Évangile comme à l’Élévation, on offre de l’encens à Notre Seigneur ; de même dans le culte extra-liturgique de l’Eucharistie, on emploie l’encens comme un témoignage d’adoration. En offrant l’encens, la communauté chrétienne veut aujourd’hui manifester sa foi vivante à la divinité de Jésus-Christ. et à la présence réelle de l’Homme-Dieu dans nos saints mystères. Il ne faut pas que ce soit une foi théorique. mais cette foi chaude et vivante qui devient brûlante au Saint-Sacrifice. A l’Évangile, le Christ est au milieu de nous et nous parle et, pendant le Canon, caché sous les voiles eucharistiques, il est réellement présent. Voilà quel est notre encens. 

Mais l’encens est aussi le symbole de la prière : “ Que ma prière s’élève vers toi, comme la fumée de l’encens ”, chante chaque soir l’Église avant le Magnificat. Offrons donc aujourd’hui au Seigneur le don de notre prière. La prière est, il est vrai, quelque chose de tout personnel, s’élevant de notre âme vers l’Esprit de Dieu, et plus elle sort des profondeurs de l’âme, meilleure elle est. Mais la prière est aussi le service de cour que nous devons à la divine Majesté. Notre Mère l’Église nous en apprend l’étiquette dans sa liturgie. La prière la plus agréable à Dieu est toujours la prière de l’Église et avec l’Église, parce que cette prière est, en dernière analyse, la prière du Christ, du Christ mystique dont l’Église est précisément le corps. Ainsi nous offrons aujourd’hui au Seigneur, avec l’encens, la prière liturgique. 

Enfin nous mettons dans ce sacrifice d’offrande toute notre vie religieuse, notre piété au sens le plus large, nous offrons avec l’Apôtre (Rom. XII, 1) notre corps comme un sacrifice vivant, agréable à Dieu, c’est notre culte raisonnable ”. 

4. Lecture d’Écriture. — Au premier Nocturne de Matines, saint Paul, dans son Épître à l’Église des Gentils (Rom. Chap. XIII et XIV), parle de nos relations avec l’État et l’autorité séculière : “ Que tous soient soumis à l’autorité. Car il n’y a aucune autorité qui ne vienne de Dieu ; là où il en existe une, elle a été établie par Dieu. Celui, par conséquent, qui se soulève contre l’autorité résiste à l’ordre de Dieu... C’est pourquoi on doit lui être soumis non seulement à cause du châtiment mais encore à cause de la conscience. Pour ce motif, payez-lui aussi les impôts, car ceux qui sont chargés de ce service sont les ministres de Dieu. Rendez à chacun ce qui lui est dû, l’impôt à qui est dû l’impôt, le tribut à qui est dû le tribut, la crainte à qui est due la crainte, l’honneur à qui est dû l’honneur. ” Ces quelques mots règlent toute notre attitude envers les pouvoirs publics ; ce passage est un commentaire de la parole célèbre du Sauveur : “ Rendez à César ce qui appartient à César et à Dieu ce qui appartient à Dieu. ” 

5. Saints du jour. On lit dans le martyrologe : “ A Arezzo en Toscane (Italie centrale), le bienheureux pape Grégoire X. Il était originaire de Plaisance (Haute Italie) et avait été archidiacre à Liége (Belgique) avant d’être élevé sur le Siège Apostolique. Il tint le second concile de Lyon. Là il parvint à amener une union avec les schismatiques Orientaux et à mettre fin au conflit qui divisait les peuples chrétiens. Il employa beaucoup de zèle à recouvrer la Terre Sainte. Ainsi son gouvernement fut animé des plus nobles intentions. ”