31 OCTOBRE - La Vigile de la Toussaint

“ Le Seigneur a magnifiquement glorifié ses saints et il les exauce quand ils crient vers lui”
La Vigile d’une fête est moins, actuellement, une nuit de veille qu’un jour de pénitence et de purification ; une purification de la demeure de l’âme pour la grande fête. Les vigiles sont des jours tout indiqués pour la confession. Précisément la vigile d’aujourd’hui a un caractère plus strict aux yeux du peuple à cause du jeûne. Si nous voulions attribuer à la vigile d’aujourd’hui une formule liturgique, nous choisirions probablement la première partie du Confiteor : En présence du chœur de tous les saints, je confesse mes péchés : mea culpa, mea maxima culpa !
1. La Messe (Judicant sancti). — La messe se distingue de, celle de la fête par les textes, mais non par les pensées. Les chants glorifient la joie et le triomphe des saints dans le ciel comme la récompense de leurs souffrances sur la terre (les textes font penser surtout aux martyrs). C’est une image sublime que saint Jean esquisse dans son Apocalypse : nous entendons chanter dans le ciel l’éternelle liturgie devant le trône de l’Agneau : “ Vous avez, par votre sang, racheté pour Dieu des hommes de toute tribu, de toute langue, de tout peuple et de toute nation, et vous les avez faits rois et prêtres pour notre Dieu. ” A l’Evangile, le Seigneur proclame les quatre béatitudes (dans saint Luc) par lesquelles Il nous trace la voie de la sainteté. L’Evangile est aussi une belle image de la messe : “ Jésus descend ”, au Saint-Sacrifice, “ de la montagne ” ; la troupe de ses disciples vient à sa rencontre et il les guérit tous. C’est à nous que cela s’applique.
2. Introduction à la fête. — Nous pouvons deviner la joie, le bonheur et la félicité de notre Mère l’Église quand il lui est donné de passer une revue de tous ses enfants qui ont atteint leur fin éternelle, qui sont entrés dans la céleste patrie et qui jouissent de l’éternelle vision de Dieu. Elle, la Mère, qui a tant lieu de craindre sur terre pour le salut de ses enfants, qui doit lutter contre l’ennemi du genre humain, qui se voit contrainte à tant de désillusions dues à l’infidélité et à la faiblesse de ses enfants, elle peut entonner aujourd’hui un joyeux Te Deum, un Magnificat de reconnaissance pour le triomphe de ceux de ses enfants qui ont combattu le bon combat et remporté la couronne de vie. C’est pourquoi, à la fête de demain, l’Église tient ses yeux fixés sur les saints ; avec la joie et la fierté d’une mère, elle ne cesse de parcourir des yeux leurs rangs. Quand nous considérons la liturgie de demain, nous y trouvons spécialement trois images par lesquelles l’Église nous présente les saints. Examinons ces images.
a) La première image est une joyeuse vision du ciel. L’Église nous prend par la main et nous conduit au ciel, Qu’y voyons-nous ? C’est la liturgie céleste bien connue que saint Jean l’évangéliste, le voyant de Pathmos, nous peint en brillantes couleurs. Nous entrons dans la basilique céleste. Là se trouve un trône élevé, entouré de Chérubins, ,sur lequel est assis Dieu le Père. Devant le trône il y a. un autel ; sur cet autel, l’Agneau immolé et glorifié ; c’est Jésus-Christ, le Rédempteur. Autour de l’autel sont rassemblés vingt-quatre vieillards, les représentants de l’ancien et du nouveau royaume de Dieu sur la terre ; en cercle alentour se tient une foule d’élus composée d’un certain nombre de Juifs, puis d’une multitude innombrable venant du paganisme, de toute race, de tout peuple et de toute nation. Ils sont vêtus de blanc, portent des palmes dans leurs mains et chantent un cantique nouveau : “ Vous nous avez rachetés par votre sang, nous qui venons de toute race, de tout peuple et de toute nation. Vous nous avez faits rois et prêtres pour notre Dieu, afin que nous régnions sur la terre. ” Les quatre Chérubins disent Amen et les vingt-quatre vieillards se prosternent en adorant Dieu et l’Agneau. Et l’Alleluia retentit sans fin. — A cette troupe nous voulons appartenir, nous aussi, un jour. Rejetons donc les chaînes qui nous tiennent attachés à la terre et montons en esprit au ciel...
b) Maintenant l’Église nous montre une autre image de ses saints enfants. Elle nous ramène sur terre et nous fait voir les saints dans leur accession à la sainteté, c’est-à-dire dans .la réalisation des huit béatitudes du sermon sur la montagne. C’est vraiment un tout autre spectacle. Nous voyons alors les disgraciés de ce monde qui parfois manquent du pain quotidien, un père, une mère qui gagnent péniblement le pain de leurs enfants, des esclaves injustement traités pendant leur vie, les héros silencieux de la vie qui ne protestent pas bruyamment contre leurs souffrances, mais les supportent courageusement, les malades cloués sur un lit de douleur, ceux qui se consument de chagrin et dont les joues sont sillonnées de larmes. A vrai dire, ce n’est pas la souffrance seule qui les a sanctifiés. mais ils l’ont reçue de la main de Dieu et en ont fait le tremplin de leur sainteté. A côté d’eux il y a des pacifiques et des miséricordieux, des âmes innocentes et pures. — C’est un chemin de croix qui se déroule devant nous : ce sont sans doute des hommes insignifiants aux yeux du monde, mais le monde n’était pas digne d’eux. Ils sont l’honneur de l’Église, de vrais saints. Voulons-nous, nous aussi, suivre cette voie ?

c) Mais l’Église a encore une troisième image dans laquelle elle se plaît à rassembler tous les saints ; c’est ce que l’on nomme le commun. L’Église range volontiers en groupes les saints qui ont mis en relief chacun des aspects de l’idéal de la sainteté. Alors quel dans le cours de l’année, elle éparpille le faisceau de ces couleurs variées, elle veut aujourd’hui en voir rassemblées toutes les parties dans la claire lumière du soleil de la Toussaint. Aux Matines, l’Église nous montre précisément cette image de tous les saints rassemblés. Au milieu d’eux se tient Dieu le Père, “ assis sur un trône haut et élevé ; les franges de sa robe remplissent le temple ; des séraphins planent au-dessus de lui ” (1er répons). Devant le trône, la première parmi tous les saints, se tient Marie, la Mère de Dieu. La milice des anges la salue de l’Ave : “ Je vous salue. Marie, pleine de grâce ; le Seigneur est avec vous ” (2e répons). Vient ensuite le chœur des anges ; eux aussi font partie de l’armée des saints : “ En présence des anges nous chanterons pour vous, et nous vous adorerons dans votre sanctuaire ” (3e répons). Maintenant se tient devant nous un saint qui n’appartient à aucun groupe, le précurseur du Seigneur dont le Christ a dit lui-même : “ Personne n’a été plus grand parmi les enfants des femmes que Jean Baptiste ” (4e répons). Ensuite voici une cohorte vénérable, la cohorte de ceux qui ont planté l’Église dans leur sang, “ ils ont bu le calice du Seigneur, ils sont devenus les amis de Dieu. Sur toute la terre retentit le son de leurs voix et jusqu’aux extrémités du globe leur prédication ” (5e répons). Ce sont les Apôtres du Seigneur, qui ont une place de choix dans l’Église de Dieu. Après eux vient la milice des martyrs, vêtus de blanc et des palmes à la main. Dur a été leur combat, magnifique est leur récompense. Le Christ leur adresse maintenant son invitation : “ Venez, les bénis de mon Père, prenez possession du royaume” (6e répons). Puis une nouvelle phalange approche à son tour. Ceux-ci ont “ les reins ceints et une lampe allumée à la main ”. Ils ont veillé et .attendu que le Seigneur revint de la noce. Ce sont les confesseurs (7e répons). Enfin un dernier groupe, celui des vierges. Elles aussi ont une ,lampe à la main et vont à la rencontre du Christ, leur Époux, avec un amour et une ardeur d’épouses (8e répons). — A quel groupe voulons-nous appartenir ? Voulons-nous acquérir les roses du martyre, fussent elles non sanglantes, ou les lis d’une vie pure, ou les violettes de la pénitence ? Combattons ; ne demeurons pas inactifs, les bras croisés. Nous sommes encore en route, nous sommes encore dans la lutte, persévérons dans la patience afin de pouvoir entrer, nous aussi, dans la phalange victorieuse des saints.