29 DÉCEMBRE - Saint Thomas de Cantorbéry, évêque et martyr (d.)

Le bon pasteur invite les pasteurs des âmes la Crèche

Je voudrais bien établir une relation entre Noël et la fête d’aujourd’hui. Néanmoins il faut reconnaître que la fête de saint Thomas n’a pas, comme les trois fêtes précédentes, de rapports voulus avec la fête de Noël. Saint Thomas n’appartient pas à l’escorte du Roi nouveau-né. 

1. Saint Thomas de Cantorbéry. — Thomas Becket, né en 1118 d’une famille de marchands, étudia à Londres et à Paris, entra au service de l’archevêque Theobald de Cantorbéry, mais devint en 1155 lord chancelier du roi Henri II d’Angleterre et en 1162 archevêque de Cantorbéry. Celui qui avait été jusque là un courtisan facile montra, dès qu’il fut évêque, une grande énergie à lutter contre le roi pour la liberté de l’Église et l’inviolabilité des biens ecclésiastiques. Cette lutte lui coûta la prison, l’exil et finalement le martyre (+29 décembre 1171). Dès 1173, il fut proclamé saint. En 1539, Henri VIII fit brûler ses ossements. Le bréviaire nous raconte : “ Des calomniateurs vinrent dire au roi que l’évêque faisait maint complot contre le roi et contre la tranquillité du royaume et le roi lui-même se plaignit que, dans son propre royaume, il n’y avait qu’un seul prêtre avec lequel il ne pût avoir la paix. A cause de ces déclarations royales, quelques courtisans impies crurent faire plaisir au roi en le débarrassant de Thomas. Ils se rendirent secrètement à Cantorbéry et attaquèrent l’évêque au moment où celui-ci assistait aux Vêpres. Comme ses prêtres se précipitaient pour leur fermer l’entrée, l’évêque ouvrit lui-même, les portes en disant aux siens : “ La maison de Dieu ne doit pas être défendue à la manière d’un camp, et pour l’Église de Dieu j’irai volontiers au devant de la mort. ” Il dit ensuite aux soldats : “ Je vous l’ordonne, au nom de Dieu, gardez-vous de faire du mal à aucun des miens. ” Ensuite, il se jeta à genoux, recommanda à Dieu, à la bienheureuse Vierge Marie, à saint Denys et aux autres saints patrons de son Église son troupeau et lui-même et, avec le même courage héroïque avec lequel il avait résisté aux lois royales, il inclina sa tête sainte et l’offrit au glaive sacrilège. C’était le 29 décembre 1171. Sa cervelle jaillit sur tout le dallage de l’église. ”

2. La messe (Gaudeamus omnes). — La messe contient toute une série de textes propres et l’Introït lui donne déjà une certaine solennité : “ Réjouissons-nous tous dans le Seigneur en ce jour de fête que nous célébrons en l’honneur de saint Thom,as martyr. ” Le leitmotiv de la messe est : “ Je suis le bon pasteur, je connais mes brebis... ” Nous l’entendons trois fois : à l’Alleluia, à l’Évangile et à la Communion. Cette comparaison du bon pasteur est doublement exacte à la messe, dans le Christ et dans saint Thomas. Le Christ réalise à chaque messe le don de lui-même pour ses brebis. Thomas est l’image du Christ et membre de son corps mystique (Offert.). Pour nous, qui nous offrons mystiquement au Saint-Sacrifice avec le Christ et avec Thomas, ayons part à l’amour, à la fidélité, au dévouement du Pasteur. Très impressionnante aussi, très belle et d’un grand sens liturgique est la magnifique Epître tirée de la lettre de saint Paul aux Hébreux. Elle nous explique le sacerdoce du Christ. Le Christ, l’éternel grand-prêtre, offre son sacrifice sanglant : ce sacrifice se continue à la messe par le ministère du sacerdoce consacré des prêtres de l’Église et du sacerdoce général du peuple. Remarquons encore que les leçons sont tirées du commun des martyrs évêques de l’Église grecque (cf. la fête de saint Josaphat, le 14 novembre). 

3. Les Heures de la fête. — Saint Jean Chrysostome,. qui fut lui-même un bon pasteur qui offrit sa vie pour ses brebis, nous parle, au bréviaire, de l’importance du ministère de pasteur. 

“ C’est une grande chose que la prélature dans l’Église, elle demande une grande sagesse et un grand courage, comme le Seigneur le recommande : nous devons donner notre vie pour nos brebis et ne jamais les abandonner, nous devons résister courageusement au loup. C’est là la différence entre le pasteur et le mercenaire : l’un ne se préoccupe que de sa propre sécurité et néglige ses brebis, l’autre se sacrifie lui-même pour l’assurer la sécurité de ses brebis. — Car aux faux pasteurs Ézéchiel a déjà dit : Malheur aux pasteurs d’Israël : ils se paissent eux-mêmes Ne sont-ce pas les brebis qui doivent être nourries par les pasteurs ? ” 

4. Les lectures de l’Écriture. — Nous commençons aujourd’hui une série suivie de lectures de l’Écriture ; nous lisons les Épîtres de saint Paul, nous continuerons de les lire jusqu’au samedi avant la Septuagésime. Si l’Église propose justement à ce moment cette lecture, elle a assurément un motif. L’Apôtre des Gentils doit prendre la parole au moment de l’Épiphanie, la fête de l’Église des nations. Isaïe pendant l’Avent a promis le royaume de Dieu, Paul doit montrer la gloire de ce royaume dans sa manifestation. Il n’est guère d’autre livre qui pourrait mieux que l’Épître aux Romains représenter la grandeur du royaume de Dieu. Il y a assurément là une rencontre d’un sens profond. Le Roi nouveau-né est entouré d’Isaïe et de saint Paul. 

Les lectures commencent donc avec l’Épître aux Romains qui est la plus importante des lettres de saint Paul, son Credo. Saint Paul explique l’œuvre. de la Rédemption du Christ dans toute sa profondeur et dans toute son étendue. L’Épître est adressée à la communauté chrétienne de Rome encore ; inconnue de lui. Cette communauté se composait de fidèles venus en partie de la Gentilité et en partie du monde Juif. Comme le judaïsme voyait en saint Paul un ennemi acharné, l’Apôtre est obligé, dans cette Épître, de s’expliquer souvent sur les relations de l’Évangile avec la loi mosaïque. Paul écrivit cette Épître à Corinthe (58 après J.-C.) en pleine activité missionnaire dans l’Orient. Il désirait déjà ardemment aller à Rome ; l’Épître est un témoignage de ce grand désir. 

Aujourd’hui nous lisons le premier chapitre. Il constitue l’introduction et l’exposé du thème général. Nous connaissons déjà les premiers versets par la messe de la vigile de Noël. Le Christ nous y est représenté, dans une formule brève et pleine, comme Homme et Dieu. Puis l’Apôtre expose le sujet de sa lettre. Dans la foi à l’Évangile réside le salut pour toute l’humanité : Juifs et païens. “ L’Évangile est la force de Dieu pour quiconque croit, d’abord pour les Juifs, ensuite pour les païens. ” Or, avant que l’Évangile fût annoncé, toute l’humanité était, par sa propre faute, exposée au jugement et à la condamnation de Dieu. Saint Paul le prouve d’abord pour les païens (18-32). Bien qu’il y ait une connaissance naturelle de Dieu — car le Créateur nous parle par sa création — le monde païen a abandonné le vrai Dieu et s’est laissé aller à l’idolâtrie. La conséquence fut une déchéance morale profonde. “ Ce qui en Dieu est invisible, sa puissance éternelle et sa divinité, se manifeste, depuis la création du monde, dans ses œuvres, si bien qu’ils n’ont aucune excuse. Et bien qu’ils connussent Dieu, ils ne l’ont pas honoré comme Dieu... mais ils sont devenus vains dans leurs pensées et leur cœur insensé s’est obscurci... Ils ont échangé la gloire du Dieu immuable pour des images d’hommes mortels, d’oiseaux, de quadrupèdes, de serpents. C’est pourquoi Dieu les a abandonnés au moyen de leurs passions à l’impureté de telle sorte qu’ils ont déshonoré leur corps... Ainsi Dieu les abandonna aux passions déshonorantes. ” Saint Paul trace ensuite un tableau effrayant de la corruption morale du paganisme.