Saint Hermès, martyr.
Notre cœur est inquiet jusqu’à ce qu’il repose en vous.
1. Saint Augustin. — La
chronique du martyrologe est remarquablement longue aujourd’hui. “ A
Hippone, dans la Province romaine d’Afrique, mort de saint Augustin, évêque et
illustre docteur de l’Église. Il fut converti à la foi chrétienne et baptisé
par saint Ambroise. Dès lors il se fit le défenseur de la vérité contre les
Manichéens et autres hérétiques, et se révéla redoutable champion de la foi.
Après une vie laborieuse entièrement consacrée au bien de l’Église, il alla
recevoir au ciel l’éternelle récompense. Par crainte des Vandales, on
transporta ses restes d’Hippone en Sardaigne ; Luitprand, roi des
Lombards, les fit plus tard transférer à Pavie où ils furent solennellement
inhumés ”. C’est en cette ville que repose encore son corps, dans l’église
appelée Ciel d’oro. — Augustin, né à Tagaste, en Afrique, l’an 353, baptisé
dans la nuit de Pâques de 387, et mort en 430, fut un des évêques, confesseurs
et docteurs les plus célèbres de tous les temps. Ses écrits marquent l’apogée
de la littérature patristique, en même temps qu’ils demeurent pour la postérité
un intense foyer de lumière : Sa conversion due aux larmes de sa mère et
aux saintes instances d’un Ambroise nous frappe d’admiration. Les “ Confessions
” qui relatent la vie d’Augustin jusqu’à l’an 400 et racontent ses égarements
et ses luttes dans un récit entrecoupé de considérations profondes et
surnaturelles ;sont un ouvrage impérissable. Un autre ouvrage “ La Cité de
Dieu ” est également un monument immortel de son génie, une philosophie de
l’histoire. Citons encore ses célèbres homélies, particulièrement celles sur
les psaumes et sur l’Évangile de saint Jean. Comme évêque, saint Augustin se
distingua surtout par ses luttes intrépides et toujours victorieuses contre les
hérétiques. Son plus beau triomphe fut la défaite des Pélagiens qui niaient la
nécessité de la grâce divine pour le salut ; ce qui lui mérita le titre de
“ Docteur de la grâce”. L’art chrétien lui donne comme emblème un cœur brûlant,
symbole de l’ardente charité qui remplit tous ses écrits. Il est le fondateur
de la vie commune canonique ; aussi les Chanoines et les Ermites Augustins
le revendiquent-ils comme patron.
2. La Messe est celle du Commun
des Docteurs (In medio). — Le célébrant me représente le grand Docteur qui
s’avance “ au milieu du sanctuaire ” ; son esprit est toujours vivant
dans l’Église. Je le vois triomphant, revêtu de la “ robe. de gloire ”. Je
l’entends prêcher, “ reprendre, supplier, menacer en toute patience et doctrine
”. Je le vois, “ comme une victime ”, consumer ses jours dans l’ardeur de son
zèle. “ J’ai combattu le bon combat, dit-il, j’ai achevé ma course, j’ai gardé
la foi ”. Je vois comment “ le Seigneur lui donne la couronne de justice
en ce jour (de sa fête) ”. Je vois en lui le “ sel ” de l’Église qui ne cesse à
travers les siècles de vivifier, d’assaisonner, de préserver de la
corruption ; je reconnais en lui la “ lumière ” de l’Église, le flambeau
qui éclaire tous ceux qui sont “ à la maison ”. Il est comme “ une
ville située sur une montagne ”... A l’Offertoire, nous unissons
notre oblation à la sienne ; il se “ multipliera” en nous.
(multiplicabitur). A la Communion, nous retrouvons en lui le
“ serviteur fidèle” qui distribue “ la mesure de froment” à la
famille de Dieu, le froment de la doctrine, le Froment de l’Eucharistie.
3. Importance de saint Augustin.
— Pour apprécier l’importance de saint Augustin examinons brièvement en lui le
fondateur d’Ordre, le docteur, et enfin l’homme.
a) le Fondateur d’Ordre.
On ne saurait attribuer à saint Augustin le titre de Fondateur d’ordre dans
le sens rigoureux du mot, comme à un saint Benoît par exemple. Néanmoins, c’est
le régime commun, tel qu’il l’avait établi chez lui à l’instar de la communauté
chrétienne primitive, qui fut réellement le modèle et l’origine des chapitres,
aussi bien des chapitres séculiers des cathédrales et des collégiales que de
l’ordre des chanoines réguliers de Saint-Augustin. La règle de saint Augustin
(appellation qui apparaît de plus en plus justifiée aux yeux de l’histoire) a
servi de norme et de directive à beaucoup de communautés et ordres religieux.
Aujourd’hui donc, en assistant à la messe, nous sommes en union non seulement
avec le grand saint, mais encore avec tous ses enfants, les innombrables
membres des communautés qui vivent sous sa règle ; qu’ils soient déjà dans
la gloire ou qu’ils continuent à combattre sur la terre. C’est donc un rameau
vigoureux de l’arbre de l’Église qui célèbre avec nous le saint sacrifice.
b) le Docteur. “ Au
milieu de l’Église, le Seigneur lui a ouvert la bouche ”. Ces paroles
s’appliquent dans leur sens le plus rigoureux à saint Augustin, un des Docteurs
de l’Église universelle. Saint Augustin est encore docteur de l’Église au sens liturgique :
Dieu lui “ ouvre toujours la bouche au milieu de l’Église” : il ne cesse
de s’y faire entendre dans un grand nombre de leçons et d’homélies ; c’est
presque toujours lui qui assume la charge de commenter l’Évangile de saint Jean
et d’expliquer les mystères des fêtes solennelles de l’année. Son commentaire
des psaumes est un des plus beaux monuments de son esprit liturgique.
c) l’Homme. Il y a
peu de saints dont la vie et les exemples émeuvent aussi profondément les
modernes que nous sommes. Il en est peu chez qui l’œuvre de la grâce apparaisse
aussi manifeste. Nous avons eu l’occasion durant ces derniers dimanches
d’analyser les deux âmes que chacun porte en soi ; le fait est
extraordinairement frappant dans la vie de saint Augustin. Fils d’une mère
chrétienne et d’un père païen, on ne lui donna pas le baptême dans son enfance.
Lui-même se déciderait librement a le recevoir, parvenu à l’âge mûr ; et
c’est ainsi que deux génies accompagnèrent ses jours. Son bon génie, c’était sa
bonne et sainte mère ; mais c’est le mauvais génie qui bien longtemps
l’emporta. Augustin se fit manichéen, et la mère pleurait et priait. Il quitta
l’Afrique en trompant la vigilance de sa mère qui voulait l’accompagner à
Rome ; elle pleurait et priait. “ Le fils de tant de larmes ne saurait
périr ” ;avait dit un saint évêque, et Monique espérait. Le mauvais génie,
cependant, entraînait son fils dans des désordres toujours plus grands,
exploitant les facultés étonnantes de sa riche nature pour accroître son
arrogance et son orgueil. Mais la grâce, elle aussi, ne cessait de veiller, et
plus Augustin sombrait dans les sentiers du vice, plus il lui assurait un
terrain favorable. Il eut la sensation du vide ; il aperçut le grand abîme
de tout cœur humain ; il constata que les biens terrestres qu’on y jette
ne sont qu’une poignée de pierres qui en couvrent à peine le fond. L’heure de
la grâce était arrivée : “ Le cœur est inquiet jusqu’à ce qu’il repose en
Dieu ”. Ambroise en fut l’instrument. Monique accourut, joyeuse, à Milan ;
elle assista au baptême de son fils, elle en fut témoin de ses propres yeux. Et
le baptême fut bien, comme il le devait, le grand événement de la vie
d’Augustin, la conversion (metanoia). A partir de ce jour, la grâce s’est
réellement emparée de son cœur. Augustin accompagne sa mère à Ostie. Elle y
meurt. Elle y meurt sans regret, car elle a engendré son fils une seconde fois
— au ciel. — Le lecteur qui possède les Confessions de saint Augustin fera bien
d’en relire quelques pages cette semaine.[1]
4. Saint Hermès. — Saint Hermès fut mis à
mort à Rome, vers 116, en même temps que le pape Alexandre 1er. Il
était fils du préfet de la ville. Un cimetière de la voie Salaria porte son
nom. On lit dans le martyrologe : “ A Rome, fête de saint Hermès,
personnage illustre qui, comme le rapportent les actes du pape Alexandre 1er,
fut d’abord renfermé dans une prison ; il subit ensuite son martyre avec
plusieurs autres, sous le juge Aurélien, en périssant par le glaive ”. Son
corps repose dans l’église Saint-Marc in Pallacine.
[1] Le lecteur
excusera la longueur de cet article en apprenant qu’il est dû à la plume d’un
chanoine de Saint-Augustin.