“ Anne” signifie “ grâce ”. Vous êtes
enfant de la grâce.
1. Sainte Anne. — “ Mère de la
Bienheureuse Vierge Marie ”, tel est le titre officiel que lui décerne
l’Église ; c’est aussi son plus beau titre de gloire. Par suite, il
convient de ranger la fête de ce jour plus encore parmi les fêtes du Sauveur
que parmi celles des saints. Anne ! la grand-mère du Seigneur selon la
chair ! Le Protévangile apocryphe de Jacques raconte que les pieux époux
Joachim et Anne jouissaient d’une certaine aisance dont ils usaient
généreusement. De leurs revenus annuels ils faisaient trois parts : l’une
pour les pauvres, l’autre pour le temple, et la dernière pour leur propre
subsistance. Mais un grand chagrin désolait leurs jours : malgré leurs
persévérantes prières ils restaient sans enfant. C’était pour Anne une grande
humiliation aux yeux de ses servantes, et il arriva à son époux d’être
publiquement chassé du temple au moment où il voulait y déposer son
offrande parce que Dieu lui avait refusé sa bénédiction. Le cœur plein d’une
immense douleur, Joachim s’enfuit dans la solitude et cria à Dieu sa détresse.
Et voici qu’un ange lui fit alors entendre ce message : “ Joachim, ta
prière a été exaucée. Une fille te sera donnée et tu l’appelleras Marie. Elle
sera, dès son enfance, consacrée à Dieu et remplie du Saint-Esprit ”. A la
même heure Anne eut une révélation semblable. Tous deux s’empressèrent alors
d’aller au temple pour y remercier je Seigneur, et se rencontrèrent, rayonnants
de joie, à la porte d’or du sanctuaire. — Quelle est la part de vérité en cette
légende ? Nous l’ignorons ; elle apprend du moins que les grandes
âmes mûrissent à l’école de la souffrance, et que, pour coopérer à l’œuvre de
la Rédemption, il faut soi-même porter sa croix. Alors même que nous
ignorerions tout de sainte Anne, ne pouvonsnous pas toujours nous la
représenter comme la mère de la Sainte Vierge et la grand-mère de
Notre-Seigneur, comme la femme noble, forte, éprouvée ? “ Tel fruit, tel
arbre” dit le proverbe. Ce que fut Anne, les textes liturgiques nous le
laissent entendre. L’Epître la dépeint sous les traits de la
“ femme forte ” qui vaque assidûment à ses travaux domestiques,
veille sur ses servantes, assiste les pauvres et se dévoue pour son mari. L’Évangile
révèle la source et le secret de sa grandeur : elle a trouvé un
trésor, celui de l’amour de Dieu. Pour acquérir cette richesse elle renonce à
tout, elle met en œuvre toute son énergie. Autre réflexion : pensons
aujourd’hui avec reconnaissance à nos grand-mères. Représentons-les-nous, ces
douces et braves femmes, assises au foyer, le chapelet à la main, priant pour
leurs enfants et leurs petits-enfants. Immédiatement après Dieu, c’est à nos
mères et à nos grand-mères que nous devons notre foi.
2. La Messe (Gaudeamus). — Elle
est en grande partie celle du commun des saintes femmes. Aux fêtes solennelles,
l’Église se sert volontiers d’un chant d’introduction (emprunté à la liturgie
grecque) immuable quant au texte et à la mélodie : “ Réjouissonsnous tous
dans le Seigneur en célébrant ce jour de fête en l’honneur de la bienheureuse
Anne. De cette solennité les anges se réjouissent et ils louent le Fils de Dieu
”. Avec joie, nous nous réunissons aussi pour fêter sainte Anne par le
Sacrifice de son petit-fils. Et ce n’est pas seulement la terre, mais le ciel
qui prend part à cette allégresse (introït). — Les chants psalmodiques
de la messe sont tous tirés du psaume 44, qui proclame l’alliance du Christ et
de l’Église. L’entrée du clergé est un cortège nuptial : en tête, Anne
comme fiancée, nous ensuite. A 1"Offertoire, nous apportons
aujourd’hui des cadeaux de noce. Sur la table est déposée la parure
nuptiale ; l’épouse royale est véritablement près de l’Époux en sa robe de
fiançailles. La Leçon donne la célèbre description de “ la femme forte ”
tirée du livre de la Sagesse : “ Qui peut trouver une femme
forte ?... ” Nous l’avons trouvée aujourd’hui en sainte Anne. Et que
furent dans sa vie la perle et le trésor dont parle l’Évangile ? L’amour
dez Dieu, l’amour du Christ pour nous, le Royaume de Dieu. “ Anne” signifie
“ enfant de la grâce ”, idée que semble vouloir souligner l’oraison. Au
Saint-Sacrifice, notre âme doit devenir aujourd’hui une nouvelle “ Anne ”, une
“ enfant de la grâce ”.