24 JUIN - Fête de la Nativité de Saint Jean-Baptiste. (double de Ire classe).

Jean était un flambeau ardent et brillant.
     
Cette fête est un morceau d’Avent dans Je temps de la Pentecôte et nous montre comment peuvent se compénétrer les mystères du salut dans l’année liturgique. Nous sommes presque au milieu de l’année liturgique et déjà se dessine l’année nouvelle, tel le bouton qui, sous la feuille, annonce en plein été le printemps prochain 
     
1. La fête. — Alors que, pour tous les autres saints, le jour de fête est le jour de mort parce que c’est en ce jour qu’ils sont entrés au ciel (natale = jour de naissance pour le ciel), l’Église célèbre aussi, pour la Sainte Vierge et pour saint Jean-Baptiste, le jour de la naissance terrestre. Tous les autres humains étaient, au moment de leur naissance. souillés du péché originel et par conséquent ennemis de Dieu. La Sainte Vierge avait été conçue sans péché, c’est pourquoi nous célébrons aussi la fête de l’Immaculée-Conception. Quant à saint Jean, il avait été purifié dans le sein de sa mère au moment de la visite de la Sainte Vierge. Telle est la justification dogmatique de notre fête. Saint Augustin, au bréviaire, légitime la fête en ces termes. “ En dehors de la très sainte fête de la naissance du Seigneur, on ne fête le jour natal d’aucun homme si ce n’est celui de Jean le Baptiste. Pour les autres saints et élus de Dieu, on fête, comme on sait, le jour où, après avoir terminé leurs fatigues et vaincu glorieusement le monde, ils renaissent à la vie et à la béatitude éternelles. Chez les autres, on glorifie l’achèvement de leurs mérites au dernier jour de leur vie. Chez Jean, on considère aussi comme saint son jour de naissance, qui est le commencement de sa vie mortelle. La raison, c’est assurément ce fait que le Seigneur a voulu faire annoncer auparavant sa venue par le Baptiste afin que, au moment de sa venue soudaine, il ne restât pas inaperçu. Jean était le symbole de l’Ancienne Alliance et représentait la Loi. C’est pourquoi Jean annonça le Rédempteur, de même que la loi précéda la grâce ”. 
     
2 .La messe (Deventre). - La messe est entièrement dominée par la pensée de la vocation du Précurseur. Dès l’Introït, il se présente lui-même devant nous et parle de sa sanctification dans le sein maternel. La liturgie applique au Précurseur les textes dans lesquels il est question de la vocation des Prophètes Isaïe et Jérémie. La leçon du bréviaire, au premier nocturne, est empruntée à la vision dans laquelle Jérémie reçoit sa vocation. Par contre, la leçon de la messe (comme d’ailleurs l’Introït) est empruntée à Isaïe. Dans les deux cas la même pensée est exprimée : le Baptiste a été, dès avant sa naissance, établi par Dieu prédicateur de pénitence et précurseur. Le Graduel est l’écho de la leçon et emprunté comme elle à l’Ancien Testament. Quant au verset de l’Alleluia, qui est le prélude de l’Évangile, il est tiré aussi de l’Évangile : Jean est envoyé devant le Seigneur pour lui préparer les voies. L’Évangile raconte la naissance et la circoncision du Baptiste. Ce fut une fête de famille mémorable. Zacharie, à peine délivré de son mutisme, circoncit l’enfant et entonne le chant prophétique, le Benedictus, dans lequel il voit déjà l’aurore du “ Soleil qui se lève”. Il est très probable que la Très Sainte Vierge, l’Épouse bénie du Saint-Esprit, assistait à cette cérémonie. Elle est le symbole d’une autre Épouse du Saint-Esprit, de notre Mère l’Église qui, aujourd’hui, dans les saints mystères, renouvelle le même spectacle. Au Saint-Sacrifice apparaît le divin “ ariens ex alto” avec son Précurseur dans son escorte. A la sainte Communion, chacun de nous est un “ propheta Altissimi ”, un prophète du Très-Haut, appelé, toute la journée, à paraître devant la “ face du Seigneur” pour lui préparer ses voies. 
     
3. Pensées sur la messe. — La messe a un aspect tout à fait personnel. Les textes sont des dialogues et des monologues. Qui parle dans ces monologues et ces dialogues ? C’est d’abord saint Jean. La liturgie est dramatique et concrète. Jean est présent parmi nous et nous parle. Il nous parle dans l’Introït et particulièrement dans la leçon (la liturgie aime faire parler dans l’Épître le saint de station). Cependant aujourd’hui nous sommes unis à saint Jean. C’est pourquoi nous parlons nous aussi dans l’Introït et la leçon. Par notre vocation à la foi et à la grâce nous avons part à sa sanctification dans le sein de sa mère (et cette sanctification est le sens de la fête). — Examinons le Graduel. Le second verset se termine ainsi : “ Et il me dit ”. La liturgie n’achève jamais ainsi. Il en résulte que le Graduel suppose l’antique manière de chanter. C’était alors le beau répons dramatique: 
La Schola (Dieu) : Avant de te tonner dans le sein maternel, je te connaissais.
Le peuple (répétant en écho) : Avant de te tonner dans le sein maternel, je te connaissais.
La Schola : (Jean) Le Seigneur a envoyé sa main ; il a touché ma bouche et il m’a dit :
Le peuple (Dieu) : Avant de te tonner dans le sein maternel, je te connaissais. 
Considérons aussi la gradation des sentiments de l’Église dans cette fête : laetitiam, honorabilem, gratiam gaudiorum, cumulamus. L’Église veut éveiller en nous la joie de la fête, la joie du sacrifice. — Encore une remarque : la messe commence par “ je ” (l’Introït aime ce “ je ”, car chacun de nous, au commencement de la messe, offre son “ moi” en sacrifice). Ce “ je ” devient peu à peu “ nous ” ; vers la fin, à la communion. le “ nous ” est remplacé par le “ tu ”. Maintenant la grâce coule dans chaque cœur particulier. 
     
4. Martyrologe. — “ A Rome, la commémoration de nombreux saints martyrs que Néron, pour détourner de sa personne l’odieux d’avoir incendié la Ville, accusa faussement de son forfait. Il les fit cruellement périr par divers genres de mort : les uns, revêtus de peaux de bêtes, furent exposés aux morsures des chiens ; d’autres furent crucifiés ; d’autres furent allumés en guise de torches afin qu’à la chute du jour ils servissent à éclairer durant la nuit. Tous étaient disciples des Apôtres ; ce furent les prémices des martyrs que l’Église romaine, champ fertile en ce genre de fruits, offrit au Seigneur avant la mort des Apôtres ”. A Rome, on célèbre, le 27 juin, une fête spéciale en l’honneur de ces premiers martyrs de l’Église romaine. Saint Pie V défendit, par respect pour le sol trempé du sang des martyrs, d’établir des jeux sur le Vatican. Un ambassadeur ayant un jour demandé des reliques au pape, celui-ci lui donna une poignée de terre de la place Saint-Pierre. L’ambassadeur se plaignait de ce qu’il considérait comme une raillerie. Le pape lui montra alors la terre rouge de sang frais[1]. 
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[1] Schuster. Liber Sacr. VII, 267.