10 AOUT - Saint Laurent, martyr (double de seconde classe).

“ Des coups du bourreau, des flammes, des tortures, des chaînes,
Seule la foi de Laurent a triomphé de tout.
Damase suppliant charge cet autel de présents,
Dans l’admiration des mérites de l’illustre martyr ”.
Inscription du pape Damase sur le tombeau de saint Laurent
1. Saint Laurent. — Le jeune diacre héroïque compte parmi les saints les plus populaires de l’Église romaine ; la fête de saint Laurent était autrefois la plus grande fête de l’année après celle de saint Pierre et de saint Paul. “ De l’orient à l’occident, écrit le pape saint Léon, lorsque resplendissent les flambeaux des lévites, Rome est aussi illustrée par Laurent que l’a été Jérusalem par Étienne ”. — A défaut d’actes authentiques, nous possédons sur le martyre de ce saint un grand nombre de témoignages d’une haute antiquité. Laurent était disciple de Sixte II, qui, gagné par ses éminentes qualités et surtout par son innocence, en fit son premier diacre. Laurent avait ainsi le privilège d’être le premier assistant du pape à l’autel, et était, même, chargé de l’administration des biens de l’Église et du soin des pauvres. Durant la persécution de l’empereur Valérien (253-260), Sixte II fut mis à mort avec quatre de ses diacres. Or, Laurent désirait ardemment être immolé avec le père de son âme : “ Père, lui disait-il, où vas-tu sans ton fils ? Où vas-tu, prêtre, sans ton diacre ? Tu avais coutume de ne jamais offrir le sacrifice sans ton ministre ! En quoi t’ai-je déplu ? M’as-tu jamais trouvé inférieur à ma tâche ? Mets-moi de nouveau à l’épreuve et vois si je suis indigne de mes fonctions à l’église. Jusqu’à ce jour, c’est à moi que tu avais confié le soin de distribuer le sang du Seigneur ”. Sixte lui répondit : “ Je ne t’abandonne pas, mon fils. Un plus grand combat pour la foi t’est réservé. Je suis un faible vieillard, c’est pourquoi le Seigneur m’épargne ; mats toi, qui es jeune, un plus grand triomphe t’est destiné. Cesse de pleurer ; en trois jours tu me suivras” L’ayant ainsi consolé, le Pontife ordonna à son diacre de distribuer les biens de l’Église aux pauvres. Tandis que Laurent s’acquittait de cette tâche chez un certain Narisce, un aveugle appelé Crescence vint le supplier de lui imposer les mains pour le guérir. Laurent fit sur lui le signe de la croix et lui rendit la vue. En prison, il accomplira encore d’autres miracles. — On avait compris, par son entretien avec Sixte II, qu’il était administrateur des biens de l’Église. Il fut arrêté et confié à un gardien du nom d’Hippolyte. Lucilus et plusieurs autres aveugle furent guéris par lui ; Hippolyte se convertit et reçu lui-même le martyre (voir au 13 août). Sollicité par le préfet de Rome de livrer les trésors qui lui étaient confiés, Laurent demanda un délai de deux jours afin de pouvoir lui donner satisfaction. Il employa ce temps rassembler les pauvres et les malades dans la maison d’Hippolyte, puis il les présenta au préfet : “ Voilà, dit-il, les trésors de l’Église ! ” Le saint fut alors livré à la torture. Tandis, qu’on le déchirait de coups, qu’on lui brûlait la peau avec des lames de fer rougies au feu : “ Seigneur Jésus, suppliait-il, ayez pitié de votre serviteur ”, et il demandait à Dieu d’éclairer ceux qui l’entouraient. C’est alors qu’un soldat, Romanus, se convertit, en déclarant : “ Je vois devant toi un jeune homme d’une éclatante beauté. Hâte-toi de me baptiser ”. Ce jeune homme était un ange qui essuyait les blessures du martyr avec un linge. De retour dans la maison d’Hippolyte, Laurent y baptisa Romanus qui fut pour cela exécuté. Vers la fin du jour, il comparut de nouveau devant le juge qui lui annonça que, cette nuit même, on allait achever son supplice : “ J’honore mon Dieu et ne sers que lui seul ; c’est pourquoi je ne redoute pas vos tourments. Cette nuit sera pour moi un jour radieux et une clarté sans obscurité ”. Telle fut sa réponse. Étendu sur un gril ardent, il raillait ses bourreaux : “ Tu peux me tourner maintenant, dit-il au tyran ; mon corps est assez rôti de ce côté D. Il reprit bientôt après : “ Me voici enfin suffisamment cuit ; tu peux manger”. On l’entendit encore rendre grâces à Dieu : “ Je te remercie, Seigneur, de m’avoir, admis à ta porte ”. Et Dieu l’encouragea ainsi dans ses tourments : “ Mon serviteur, sois sans crainte : je suis avec toi ”. Saint Laurent acheva son martyre sur le mont Viminal et fut enseveli auprès de la voie de Tibur. — Telle fut la passion du héros chrétien dont le bréviaire romain reprend le récit dans les chants de l’office, antiennes et répons. Sur le tombeau du diacre Laurent s’élève une église dont les origines remontent à l’époque de Constantin. Saint-Laurent-hors-les-murs est une des sept basiliques patriarcales de Rome.
     
2. L’Office du jour. — Nous pouvons faire de cette journée une journée liturgique en l’honneur de saint Laurent. La prière des Heures est remarquablement expressive et touchante en sa simplicité. La grande solennité a commencé hier soir, à Vêpres. L’office de matines est vraiment saisissant avec son ordonnance classique : “ Le bienheureux Laurent, Martyr du Christ, a été couronné et triomphe dans le ciel : venez, adorons le Seigneur ” (Invitatoire). Entre les psaumes habituels, vont s’intercaler les antiennes historiques avec leurs dialogues si vivants qu’il nous semble les entendre de nos propres oreilles. Viennent les leçons du premier nocturne (reconnaissance du Saint pour ses souffrances) également entrecoupées de répons historiques, et, plus loin, la belle homélie de saint Léon le Grand. Nous réciterons avec une dévotion particulière le psaume XVI qui chante les souffrances de saint Laurent sur son gril : “ Vous avez éprouvé mon cœur et vous l’avez visité pendant la nuit ; vous m’avez soumis à l’épreuve du feu, et l’iniquité ne s’est pas trouvée en moi” (voir encore le Graduel). — C’est joyeusement que nous quittons aujourd’hui notre couche ; nous récitons Laudes avec notre saint, et avec quelle ardeur pouvons-nous redire comme lui la prière matinale du psaume LXXII : “ Dès l’aurore, j’aspire vers toi. Mon âme a soif de toi, car, pour toi, mon Dieu, ma chair se consume ! ” — Passons à la messe. Quel magnifique sacrifice avec ses trois victimes : le Christ, saint Laurent, la communauté des fidèles ! Le grain de froment en est aujourd’hui le symbole (Epître et Évangile). Le grain de froment représente le Christ “ mis à mort par la perfidie des Juifs, et multiplié par la foi des peuples ”. Le grain de froment, c’est Laurent enseveli dans la mort, et multiplié par son intercession et son exemple. Le grain de froment c’est la sainte Eucharistie aussi : il est enfoui dans le champ de l’âme pour reparaître multiplié dans une vraie vie chrétienne. Relevons encore cette allusion : “ Celui qui sème peu moissonnera peu aussi ; et celui qui sème avec abondance moissonnera de même avec abondance ”. — Ma journée est commencée ; Laurent, le vaillant héros de la charité du Sauveur, est toujours à mes côtés. Que surviennent une souffrance, une tentation, une épreuve, il est là pour me dire : “ Voilà qui n’est pas encore mon gril ! ” Tous les jours, après la messe, nous faisons à Dieu cette prière : “ Seigneur, daignez éteindre en nous l’ardeur de nos vices, vous qui avez accordé au bienheureux Laurent de surmonter le feu qui le dévorait ”. (Il y avait autrefois, dans le palais du Latran, une chapelle dédiée à saint Laurent ; c’était l’endroit où le pape quittait ses vêtements sacrés et faisait son action de grâces. Ce détail explique l’origine de l’oraison récitée après la messe).